De retour à son dortoir, Song Shuhang poussa la porte d’entrée et s’annonça doucement. « Je suis de retour. »

Personne ne lui répondit.

Il n’y a personne ?

Il baissa les yeux vers l’étagère où ils rangeaient leurs chaussures. La demande pour son congé n’était plus là, ses colocataires l’ayant transmise à leur professeur.

« Les cours ne sont pas encore terminés ? Je me souviens qu’il y avait à l’origine quatre heures de prévues cet après-midi, mais puisque les deux jambes du Professeur Renshui sont fracturées, il n’est pas encore sorti de l’hôpital. Il ne devrait donc y avoir que deux heures, non ? » raisonna-t-il.

Peut-être étaient-ils retournés chez Yangde ?

C’était aussi bien. Puisqu’ils n’étaient pas là, il allait être plus simple pour le Maître Praticien de venir récupérer les techniques et l’épée volante, sans avoir à s’inquiéter de la réaction de ses colocataires.

Tout en réfléchissant, il retira ses chaussures et se prépara à entrer dans la chambre.

Mais juste à ce moment-là, il entendit une conversation venant de celle-ci.

« Je t’en supplie, Gao Moumou, seul toi parmi tous ceux que je connais a une petite amie ! » résonna une voix au genre indéfinissable, mais claire et nette.

« Et alors, qu’est-ce que tu essaies de me dire ? S’il te plaît, écarte-toi de moi, ton expression est dégoûtante ! Si tu as quelque chose à dire, dis-le purement et simplement » rétorqua Gao Moumou.

Devant lui se tenait un étudiant métis aux cheveux dorés, portant l’uniforme de Jiangnan.

À première vue, il était vraiment beau gosse, mais en y regardant de plus près, n’était-il pas en réalité une belle demoiselle travestie ?

C’était un humain dont le genre ne pouvait pas être déterminé juste en le regardant.

Et à cet instant, cet étudiant de sexe inconnu manifestait sur son visage un désir insatisfait, tout en parlant et en s’approchant de son interlocuteur.

Gao Moumou tendit la main pour l’arrêter et mettre de l’espace entre eux. S’ils n’étaient pas des amis d’enfance, il l’aurait envoyé voler depuis longtemps.

« Voilà, aujourd’hui, j’ai rendez-vous avec Xiaomei » rit la voix androgyne, nageant dans le bonheur.

Xiaomei, ça ressemble à un nom de femme, non ? Alors cet étudiant est peut-être un homme ?

Gao Moumou le félicita calmement : « Oh, n’est-ce pas génial ? »

« Après, je lui ai tenu la main et je me sens si bien ! » Il se roula avec énergie sur le lit de son ami, apparemment très excité.

Celui-ci poursuivit : « D’accord, je comprends ton excitation, mais je suis vraiment pressé par le temps, peux-tu aller droit au but ? »

« Gao Moumou, tu ne sais vraiment pas t’adapter aux autres, tu es si brusque ! Même si nous étions des amoureux d’enfance, tu es maintenant incapable de m’atteindre. Dire que nos deux familles avaient l’intention de nous unir… » lui reprocha-t-il.

« Zhu Geyue, s’il te plaît, va droit au but. » demanda-t-il en se massant les tempes.

« OK… en fait, comme c’est la première fois que je sors avec quelqu’un, je me sens stressé et un peu raide. C’est tellement frustrant ! » dit-il d’un air morose.

Gao Moumou ne sut pas quoi répondre.

« Demain, j’ai invité Xiaomei, et cette fois, je me prépare à l’embrasser ! Mais voilà, je n’ai jamais embrassé quelqu’un auparavant, j’ai peur d’y aller trop fort et de lui faire mal en cognant ses dents… » Arrivé à ce niveau-là, les yeux brillants de Zhu Geyue fixèrent son ami.

Sans en connaître la raison, le cœur de Gao Moumou s’arrêta un instant et une sensation de danger l’envahit. « Quoi ? Tu veux me demander de t’apprendre à embrasser ? »

« On peut dire ça comme ça. Après tout, parmi tous mes meilleurs amis, tu es le seul à avoir une copine depuis suffisamment longtemps pour l’avoir embrassée plusieurs fois, non ? »

Gao Moumou hocha la tête. Il était incapable de le contredire.

« Alors, laisse-moi t’embrasser. Aide-moi à pratiquer les meilleurs techniques ! » conclut Zhu Geyue en serrant le poing.

« Quoi… attend un moment, tu as dit quoi ? » Tout le corps de Gao Moumou frissonna en regardant l’individu sans-gêne devant lui.

« Laisse-moi t’embrasser à la française ! » cria-t-il.

« Je suis désolé, je dois refuser. Tu ne m’attires pas et j’ai déjà une petite amie. Trouve quelque chose d’autre… comme un coussin, ou un pilier, n’importe quoi ! » refusa-t-il résolument.

« Cela ne marchera pas. J’ai essayé avec un oreiller et avec une poupée, mais il n’y a absolument aucune sensation. J’ai besoin de vrais lèvres pour m’entrainer, surtout pour embrasser avec la langue ! S’il te plaît, de tous mes amis, toi seul peux m’aider ! » plaida Zhu Geyue sincèrement.

« Laisse-moi te donner une bonne adresse, deux rues à l’extérieur de l’enceinte de l’université, les compétences des dames dont c’est le métier sont superbes. Je peux te garantir que tu apprendra tout un tas de techniques qui pourront satisfaire Xiaomei » expliqua Gao Moumou.

« Impossible, je ne trahirai jamais Xiaomei ! » s’exclama-t-il, rejetant l’idée. « Aller, Gao Moumou, aide-moi. Rassure-toi, il n’y a aucun problème puisque nous sommes des amis proches. Et puis, j’ai préparé une pellicule de plastique. Si tu es vraiment timide, on peut s’en servir ! »

« Même s’il y a une pellicule de plastique, je ne t’aiderai jamais ! Tu as peut-être perdu la tête, mais pas moi. Si tu ne peux pas laisser tomber Xiaomei, est-ce que moi je dois tromper ma copine ? Impossible, abandonne ! Eh, attend, qu’est-ce que tu fais ? Omph !»

Ce qui suivit ensuite fut la lutte acharnée de Gao Moumou et le bruit d’objets qui tombaient au sol.

En entendant cela, les genoux de Song Shuhang tremblèrent. Qu e… N e me dites pas que Gao Moumou va se faire agresser sexuellement ?

En tant que bon colocataire, devait-il entrer pour l’aider ? Ou devait-il attendre tranquillement que l’assaut se termine avant d’aller le consoler ?

En réfléchissant un moment, il sentit qu’il valait mieux couper la poire en deux. Je vais attendre deux minutes avant d’entrer .

Après tout, Gao Moumou était quelqu’un de fier. Même s’il avait fermement refusé, que faire si son corps était honnête, lui ? Ne gâcherait-il pas son bonheur ?

Un peu plus d’une minute plus tard.

Alors qu’il se demandait encore s’il devait entrer ou non, la porte de la chambre s’ouvrit.

Avec ses cheveux d’or, Zhu Geyue en sortit, un air satisfait sur son visage rougi.

La vue de Song Shuhang était extrêmement bonne. Il se contenta d’un léger coup d’œil à l’intérieur et il put clairement voir Gao Moumou immobile, comme mort sur le lit, complètement brisé.

Lorsqu’il ouvrit la porte, il vit soudain devant lui le jeune étudiant qui hésitait à l’extérieur de la chambre. Son visage se raidit immédiatement et son expression de fierté victorieuse disparut, remplacée par une rougeur timide. Dire qu’il savait ce que signifiait être embarrassé.

« Haha ! Vous avez terminé ? » Song Shuhang imita le rire chaleureux du Maître Praticien, essayant d’éviter le sujet avant d’être trop mal à l’aise.

Zhu Geyue cligna des yeux et révéla immédiatement un sourire clair et lumineux, avant de lui tendre sa main droite. « Bonjour, je suis Zhu Geyue, avec Gao Moumou nous sommes des amis d’enfance. »

« Bonjour, je suis le compagnon de chambre de Gao Moumou, Song Shuhang. » Il saisit sa main et la serra prudemment. C’était une petite main élancée. Il en déduisit que cette personne était probablement une fille.

Cependant, en regardant son colocataire défait dans la chambre… S’il avait été forcé d’embrasser une femme, pourquoi une telle réaction ? Finalement, il se disait que Zhu Geyue devait sans doute être un homme.

« Enchanté de te rencontrer. Gao Moumou peut être trop fier et maladroit. J’espère que tu prendras soin de lui. » Puis cet individu sourit doucement, donnant l’impression qu’il venait d’une famille particulièrement aisée.

En regardant son apparence actuelle, qui aurait pensé qu’une minute plus tôt, il avait embrassé Gao Moumou jusqu’à ce qu’il devînt une loque ?

« Tu es trop poli. En fait, c’est surtout lui qui m’a aidé jusqu’ici » répondit Song Shuhang en souriant.

« En parlant de ça, il me semble avoir déjà entendu ton nom quelque part… » Zhu Geyue cligna des yeux et commença à réfléchir.

« J’en doute, c’est la première fois que je rencontre l’étudiant Zhu Geyue » affirma-t-il.

« Non, impossible que je me trompe. » Zhu Geyue fronça les sourcils et se concentra profondément.

Un instant plus tard, cette personne tappa soudainement dans ses mains et s’exclama : « Je m’en souviens ! Song Shuhang, as-tu offensé quelqu’un récemment ? »