Sous le Chêne | Under the Oak Tree
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Chapitre 202
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Max s’empresse de plier les genoux pour s’incliner à son tour. Son estomac se noua de nervosité lorsqu’elle réalisa que le jeune homme devant elle était le commandant des chevaliers sacrés.

Elle a serré du poing la lettre dans sa poche. Elle avait beau y réfléchir, il lui semblait inapproprié de demander au commandant des chevaliers sacrés de lui faire une course comme la remise d’une lettre. Elle a fait un pas en arrière, se sentant gênée par son regard.

“Je m’excuse de… vous déranger.”

“Pas du tout, si la dame a quelque chose à demander, n’hésitez pas à me le dire.”

dit l’archiduc avec un sourire amical. Après avoir hésité un moment et repoussé ses pensées inquiètes, Max a finalement ouvert la bouche pour parler.

“Si ce n’est pas trop demander… J’espérais envoyer une lettre… à mon mari…”

“Une lettre ?”

L’archiduc la regarde avec un visage curieux. Max se tortille sur place et sort la lettre de sa poche. La lettre qu’elle avait mis tant d’efforts à perfectionner était maintenant froissée en une heure à peine. Ses joues rougissent alors qu’elle essaie de redresser les plis.

“Pourriez-vous remettre ceci à mon mari ? Il ne contient rien… d’important. Je voulais juste lui faire savoir comment j’allais…”

“Vous me demandez de lui remettre cette lettre ?”

demanda le paladin d’un ton sec. Elle était placée sous la pression de son regard indifférent et cela faisait qu’elle parlait en phrases baragouinées.

“Si cela ne pose pas de problème au s-sir… quand-que vous arriverez à Louiebell… et que vous verrez mon mari… si-si vous pouviez la lui donner alors…”

Face à une personne masquée par une expression indéchiffrable, la voix de Max a commencé à se briser. Elle transpirait abondamment d’avoir eu l’audace de demander une faveur, mais l’archiduc est soudainement intervenu avec une expression troublée.

“Dame Calypse, les chevaliers sacrés vont arriver par les frontières orientales de Louiebell. Les Chevaliers Remdragon sont stationnés sur les frontières occidentales, ils ne pourront pas se rencontrer tout de suite.”

“Je… je vois. Je ne le savais pas…”

Elle froissa la lettre et baissa le regard, déçue. Puis, le paladin prit la lettre de sa main, son sourire était sec et il semblait calme malgré son expression stoïque.

“Il ne sera peut-être pas possible de la remettre tout de suite… mais je la lui remettrai dès que nous nous rencontrerons. Je lui dois quelque chose.”

Une brève exaltation passa sur elle, mais son ton étrange l’inquiéta. Max le regarda confusément.

“Alors… s’il vous plaît.”

A la réponse désespérée de Max, les yeux de l’homme se sont légèrement rétrécis. Puis, il a rangé la lettre dans sa robe et a parlé doucement.

“Je vais m’assurer que ça lui parvienne. Ne vous inquiétez pas.”

“Eh bien, il semble que tout soit prêt, nous devons commencer le voyage.”

Sous l’impulsion de l’Archiduc, Sir Quahel Leon s’inclina devant elle et descendit gracieusement l’escalier. Max regarda, hébété, le jeune homme se frayer un chemin dans les rangs. Le drapeau du paladin flottait frénétiquement dans le vent d’été, comme s’il annonçait les turbulentes batailles à venir.

“S’il vous plaît, excusez-moi aussi, ma dame.”

“Ah… Je m’excuse de vous interrompu.”

L’archiduc lui fit un sourire qui indiquait que tout allait bien et descendit les escaliers pour suivre le paladin. Max les observa alors qu’ils se préparaient à partir, puis retourna au monastère.

Son cœur battait si fort qu’elle joignit fermement ses mains et ferma les yeux. Maintenant, tout ce qu’elle pouvait faire pour eux était de prier pour le meilleur.

***

Dix jours après que les chevaliers sacrés eurent rejoint la bataille, la nouvelle de la reconquête de Louiebell se répandit dans la capitale. Des acclamations et des célébrations éclatèrent partout, jusqu’à ce que les corps des soldats et des chevaliers morts sur le champ de bataille franchissent sans fin les portes de la ville. Une longue file de chariots chargés de cadavres remplit la cour du temple et les gens se rassemblèrent pour voir si leur famille se trouvait parmi eux.

Max est également venue avec les dames de Livadon, anxieuse et nerveuse, se demandant s’il y avait quelqu’un qu’elle connaissait parmi eux. L’état des corps ne ressemblait à rien de ce que Max pouvait imaginer. Bien que tous aient été lavés, habillés et préparés pour les funérailles, les prothèses ne pouvaient pas couvrir la mort misérable que ces hommes avaient subie. Très peu d’entre eux avaient encore leurs membres en place et certains avaient des tissus noirs couvrant la partie supérieure de leur torse, car ils avaient été décapités au combat.

Le visage pâle, Max a regardé les prêtres placer soigneusement les corps dans leurs cercueils respectifs. Certaines des nobles dames se sont évanouies sur place, et elle aussi était sur le point de s’évanouir, mais elle a enduré la sensation de malaise. Elle devait s’assurer que ni Riftan ni aucun des chevaliers Remdragon ne se trouvait parmi eux.

Max erra à travers les rangées de corps et ravala l’envie de vomir alors qu’elle luttait pour voir et essayer de reconnaître les visages. Incapable de supporter le vertige qui l’avait envahie, elle s’éloigna rapidement et s’accroupit sous un arbre à l’angle de la cour bourbeuse du temple. L’une des dames la suivit, inquiète de son état.

“Vous allez bien ?”

Max a levé les yeux, les yeux tremblants. C’était la dame qui s’était présentée il y a peu, Idcilla Calima. Les yeux fauves de la jeune femme l’observaient avec inquiétude.

“Votre teint n’a pas l’air bien. Dois-je appeler un prêtre ?”

“Oh n-non. J’étais juste un peu… étourdie. Et vous, Lady Calima, vous allez bien ?”

“Je vais bien. Je suis une dame issue d’une famille de chevaliers, cela ne me dérange pas.” La jeune fille relevait courageusement la tête, mais son teint était tout aussi pâle que le sien. Idcilla se tourna vers les cercueils et regarda à travers les rangées, comme pour cacher sa faiblesse. “Heureusement, mon frère n’est pas parmi eux. J’ai demandé aux soldats qui ont ramené les corps et ils ont dit que la plupart des personnes qui étaient piégées à Louiebell sont en sécurité.”

“V-vraiment ?”

Ruth et les autres Chevaliers Remdragon sont apparus devant Max, et une vague d’espoir a fleuri en elle, cependant, elle s’est rapidement évanouie lorsqu’elle s’est rappelée qu’Idcilla avait mentionné que “la plupart” des gens étaient en sécurité. Max regarda à nouveau les dizaines de cadavres et essaya bientôt de calmer son cœur tremblant, se levant pour s’approcher des prêtres qui rassemblaient les cadavres.

Le soulagement et la tristesse se mêlent dans la cour des gens qui regardent les prêtres nommer les corps avec l’identification qui leur est attachée. On pouvait entendre des soupirs de soulagement et des gémissements fuser de partout. Max ne pouvait pas se détendre avant que le nom du dernier corps soit identifié. Elle titubait en descendant les escaliers, couverte de sueur froide.

Son corps entier tremble. Le soulagement l’envahit, mais en même temps, elle sent un frisson courir sur ses os. Elle tenait fermement ses mains froides et moites. Idcilla s’est précipitée vers elle en voyant son état de faiblesse.

“M’dame, retournons au monastère pour l’instant. Je vais vous accompagner.”

“M-merci.”

Max monta maladroitement les escaliers, se balançant de gauche à droite en s’appuyant sur la jeune fille, qui était légèrement plus grande qu’elle. Soudain, la honte l’envahit. Idcilla n’avait que dix-huit ans, c’était gênant qu’une fille de quatre ans plus jeune qu’elle puisse se sentir beaucoup mieux qu’elle. Alors qu’elle entrait dans la Grande Chapelle sur des jambes tremblantes, elle fit de son mieux pour se redresser.

“Je vais bien, maintenant. Je peux marcher… toute seule.”

“Ce n’est pas grave. Je me sentirai plus à l’aise si je suis là pour rattraper la dame au cas où elle s’évanouirait.”

Max fronce les sourcils devant la franchise de ses propos. “Je… je ne vais pas m’évanouir.”

La jeune fille a regardé son visage avec attention et a hoché lentement la tête. “Je vois ça maintenant. Pour être honnête, j’ai été surprise. Je pensais que Lady Calypse serait la première à s’évanouir.”

“Vous… vous moquez de moi ?”

La fille a rougi et a soupiré. “Je ne voulais pas que ce soit une insulte, je m’excuse si vous avez été offensée. Ma cousine Alyssa me dit souvent que je vais avoir des problèmes à cause de ma franchise.”

“…Je pense qu’elle a raison.”

La jeune fille sourit faiblement au ton sarcastique et direct de Max. “Madame semble avoir un cœur tendre, mais en réalité, je pense qu’elle n’est pas comme ça.”

“Assez de plaisanteries. Ça ne me fait pas… du bien.”

“Je pensais mes mots dans le bon sens. Alyssa n’a pas supporté de regarder les cadavres, alors elle est retournée dans sa chambre presque immédiatement.” Idcilla a dit, puis son visage s’est soudainement assombri. “Ce n’est pas de sa faute. Alyssa est très faible d’esprit. Et elle aime tellement Elba. Elle a trop peur de regarder, elle ne veut pas le voir au cas où Elba serait parmi ces hommes vaincus.”

“Qui est… Elba ?”

demande Max par curiosité. Elle pensait que parler à Idcilla l’aiderait à se calmer et à chasser de son esprit les visages persistants des hommes morts.

“Elba est le diminutif d’Elbarto Calima, c’est mon deuxième frère aîné. Alyssa et lui sont fiancés depuis l’âge de douze ans. Au moment où il a été ordonné chevalier, il a offert son geth à Alyssa.”

“Il est rare d’offrir un geth… à la personne à laquelle on est fiancé.”

Traditionnellement, les chevaliers dédient leur geth à une dame royale ou à la femme ou la fille du seigneur qu’ils servent. Idcilla hocha la tête, indiquant que les traditions culturelles de Livadon en matière de chevalerie n’étaient pas si différentes de celles de Whedon.

“Le cas entre ces deux-là est vraiment spécial. Alyssa sera heureuse d’apprendre que mon frère est toujours en vie. Maintenant, asseyons-nous et reposons-nous un moment, mes jambes commencent à me faire mal.”

Elles s’arrêtèrent devant un pavillon dans les jardins et Max s’assit sur une chaise, expirant un souffle tremblant. Idcilla s’est assise en face d’elle et a redressé la jupe de sa robe en silence. Bien qu’elle ne soit pas assise très près de Max, sa compagnie lui apportait du réconfort. Si elle était retournée seule dans sa chambre comme elle l’avait prévu, les images des cadavres mutilés l’auraient hantée.

Soudain, Max a compris pourquoi Idcilla l’avait aidée. La jeune femme était également sous le choc.

Idcilla lui adressa un sourire crispé et mit ses mains sur ses genoux. “Les prêtres et prêtresses seront occupés par les funérailles pendant les prochains jours.”

“M-mais… maintenant que la bataille est terminée, tous les chevaliers ne devraient-ils pas revenir ?”

“Vous n’avez pas entendu ?” Les yeux de la jeune fille se sont élargis à sa question.

“Les forces alliées ont décidé de se rendre au nord. Maintenant qu’ils ont réussi à reprendre Louiebell, l’armée des monstres se replie sur le plateau de Pamela et les chevaliers vont les poursuivre. Ils reprendront également les autres terres conquises par les monstres.”

“A-alors…” Max n’a pas pu éviter de bégayer sur ses lèvres tremblantes. “A-alors… quand est-ce que tout cela sera terminé ?”

C’était une question stupide à laquelle personne ne pouvait répondre, et encore moins la jeune fille assise à ses côtés. Idcilla garda les lèvres fermées et Max appuya faiblement sa tête contre la colonne de pierre. Malgré la chaleur humide de l’été, des frissons couraient dans ses os. La bataille de Louibell n’était que le début. Tous les trois ou quatre jours, les soldats ramenaient des chariots chargés de cadavres. Comme le disait Idcilla, les prêtres couraient toute la journée pour préparer et organiser les funérailles. On pouvait entendre les chants de requiem résonner dans le grand temple.

Sans une procession funéraire et un rituel de purification appropriés, ceux qui avaient perdu la vie pouvaient devenir des goules ou des liches. Pour cette raison, des centaines de corps étaient nettoyés en masse dans le Grand Temple chaque jour, et les familles endeuillées remplissaient le grand temple. Bien que le monastère soit calme, des sons de gémissements et de pleurs éclataient chaque jour dans le grand hall.

L’atmosphère lugubre était si lourde que l’archiduc Aren est même venu proposer de préparer une place pour Max dans son château. Mais Max refusq, car lorsque les nouvelles des forces alliées arrivent, le temple est le premier à recevoir l’information.



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