Le Maître des Secrets | Lord of the Mysteries | 诡秘之主
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Chapitre 1 : Cramoisi
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« Ça fait mal! Ma tête me fait mal! »

Le monde onirique coloré, éblouissant et rempli de murmures de Zhou Mingrui se brisa tandis qu’une douleur lancinante, anormale, lui martelait la tête. On aurait dit que quelqu’un le frappait sans répit avec un bâton… ou plutôt lui enfonçait un objet pointu dans le crâne et le tournait.

Frappé de stupeur, Zhou Mingrui tenta de se retourner, de lever les yeux et de s’asseoir mais il ne pouvait plus bouger, comme s’il avait perdu tout contrôle sur son corps.

« Apparemment, je suis encore dans un rêve… peut-être que ce qui va se passer me donnera le sentiment que je suis éveillé alors qu’il n’en est rien… »

Zhou Mingrui, qui n’avait pas l’habitude de faire de pareilles expériences, fit de son mieux pour se concentrer et échapper aux entraves de l’obscurité et de la confusion.

Il était toujours dans sa rêverie et tout ce qu’il invoquait était aussi éthéré qu’une brume fugace. Il avait le plus grand mal à contrôler sa réflexion et son introspection, et des pensées parasites l’assaillaient continuellement, l’empêchant de se concentrer.

« Pourquoi ai-je si mal à la tête au beau milieu de la nuit ? Suis-je en train de faire une hémorragie cérébrale ou un truc dans le genre ? Bon sang, je ne vais tout de même pas mourir si jeune! Vite, il faut que je me réveille!

« Tiens, c’est un peu moins douloureux…Mais j’ai toujours l’impression qu’on me tranche le cerveau avec un couteau émoussé…  Apparemment, c’est râpé pour dormir. Et je suis supposé travailler demain! Mais j’y pense, puisque j’ai la migraine, je vais prendre un congé. Mon chef ne pourra rien dire »

« Vu comme ça, ce n’est pas si grave après tout. J’aurai enfin un peu de temps libre, Héhé! »

Les douleurs lancinantes qui le submergeaient lui permirent d’accumuler suffisamment de force immatérielle pour bouger le dos et ouvrir les yeux. Il sortit enfin de sa torpeur.

D’abord il vit trouble puis sa vue se trouva masquée par un léger voile cramoisi. Devant lui se trouvait un bureau de bois massif au milieu duquel reposait un cahier aux pages jaunies dont le titre, écrit en étranges lettres noires, attira son attention.

Sur la gauche étaient soigneusement empilés une huitaine de livres et sur la droite se dressait un mur encastré de tuyaux gris-blancs reliés à des lampes murales de style occidental ancien. Moitié aussi grandes que la tête d’un adulte, elles se composaient d’une couche de verre protégés par une grille de métal noir.

Sous la lampe, en descendant en diagonale, se trouvait un encrier auréolé d’une pâle lumière rouge qui évoquait vaguement la forme d’un ange et juste devant, à droite du cahier, reposait une plume noire au corps bien rond et dont l’extrémité scintillait et non loin de là, un revolver à la teinte cuivrée.

Un pistolet ? Un revolver ? Zhou Mingrui était totalement décontenancé. En effet, il ne reconnaissait rien de tout ce qui se trouvait devant lui. Cela ne ressemblait pas à sa chambre! Stupéfait et confus, il s’aperçut que le bureau, le cahier, la bouteille d’encre et le revolver étaient auréolés d’une sorte de voile cramoisie provenant de la lumière qui filtrait par la fenêtre.

Inconsciemment, il leva peu à peu les yeux.

Une lune cramoisie était suspendue dans les airs et brillait dans le silence avec pour toile de fond un « rideau de velours noir ».

Zhou Mingrui se leva d’un bond, horrifié sans savoir pourquoi. Mais avant même que ses pieds ne soient bien fermes sur le sol, une douleur lancinante lui traversa la tête. Durant un instant, il perdit ses forces et s’effondra de tout son poids sur une robuste chaise de bois.

La douleur diminuant, Zhou se releva péniblement, fit le tour de la pièce, nerveux, et commença à réaliser dans quel environnement il se trouvait.

La pièce n’était pas très grande. A chaque extrémité se trouvait un porte marron et près de l’un des murs opposés un lit bas en bois. Un meuble aux portes grandes ouvertes avec en dessous cinq tiroirs trônait entre le lit et la porte de gauche et sur le mur, à hauteur d’homme, on pouvait apercevoir un autre de ces tuyaux d’un blanc grisâtre. Cette fois, cependant, il était relié à un étrange dispositif mécanique aux engrenages et aux roulements à bille apparents.

Dans le coin droit de la pièce, près de la table, se trouvait des objets qui ressemblaient à des poêles à charbon ainsi que des marmites, des pots de fer et autres ustensiles de cuisine.

Face à la porte de droite se dressait un miroir doublement fissuré sur un cadre de bois orné de motifs simples.

C’est en balayant la pièce du regard qu’il aperçut, dans ce miroir, son nouveau « moi » : un jeune homme aux cheveux noirs, aux yeux bruns, plutôt mince sous sa chemise de lin. Les traits de son visage étaient communs mais assez profonds.

Zhou Mingrui en eut le souffle coupé et en un instant, une foule de suppositions confuses lui traversèrent l’esprit.

Le revolver de style européen plutôt ancien et la lune cramoisie, visiblement différente de celle qu’il voyait sur terre, ne pouvaient signifier qu’une chose!

« Aurais-je transmigré ? » Se demanda Zhou, la bouche entrouverte.

Lui qui avait grandi en lisant des romans sur le Web avait souvent imaginé pareilles scènes mais en réalisant que cette fois, il en était le personnage central, il eut peine à l’accepter.

« Voilà sans doute ce qui arrive lorsqu’on aime la fiction », se reprocha-t-il tandis qu’il s’efforçait de tirer le meilleur parti de sa pénible situation.

Sans la douleur lancinante qui lui martelait la tête et le fait que, quoique tendu, il avait les idées claires, il aurait pu penser qu’il s’agissait d’un rêve.

Calme-toi, calme-toi, calme-toi… Se dit Zhou en prenant quelques grandes respirations, s’efforçant d’enrayer la panique qui s’était emparée de lui.

Mais alors que son esprit et son corps s’apaisaient, des souvenirs l’assaillirent brusquement.

Klein Moretti, citoyen de la ville de Tingen, du Comté d’Awwa dans le Royaume de Loen situé au Nord du continent, récemment diplômé du Département d’Histoire de l’Université de Khoy…

Son père était un sergent de l’Armée Impériale qui s’était sacrifié lors d’un conflit colonial avec le Continent du Sud. Son indemnité de décès avait permis à Klein d’étudier dans une école de langues privée et posé les jalons de son admission à l’université…

Sa mère, une adepte de la Déesse de la Nuit Éternelle, était décédée l’année même où Klein avait passé les examens d’entrée à l’université de Khoy…

Il avait également un frère aîné et une sœur cadette qui vivaient ensemble dans un appartement de deux chambres.

La famille n’était pas riche. On pouvait même dire qu’elle vivait à la limite de la précarité, soutenue uniquement par le frère aîné qui travaillait comme commis dans une entreprise d’import-export.

Diplômé en histoire, Klein avait acquis des connaissances dans la langue ancienne de Feysac, réputée être à l’origine de toutes les langues du Nord, ainsi que dans la langue d’Hermès, que l’on retrouvait souvent dans des mausolées anciens ainsi que dans les textes relatifs aux rituels de sacrifice et de prière…

La langue d’Hermès ? L’esprit de Zhou Mingrui était en émoi. Il frotta ses tempes douloureuses et posa les yeux sur le cahier ouvert sur la table. D’abord étrange, le texte inscrit sur le papier jauni lui devint peu à peu familier et il put enfin le lire.

Il était écrit en langue d’Hermès et l’encre noire disait :

« Tout le monde, moi compris, va mourir. »

Sans savoir pourquoi, Zhou Mingrui était horrifié. Instinctivement, il se pencha en arrière pour tenter de prendre de la distance avec le cahier de notes et avec le texte qui y était écrit.

Encore très faible, il manqua tomber à la renverse mais parvint à se raccrocher au bord de la table. L’air autour de lui était agité : il pouvait entendre comme de faibles murmures qui lui rappelaient les histoires effrayantes que lui racontaient ses aînés lorsqu’il était jeune.

Il secoua la tête, persuadé qu’il ne s’agissait que d’une illusion. Puis, son équilibre retrouvé, il détourna le regard et reprit son souffle.

Ses yeux se posèrent alors sur le revolver cuivré scintillant et une question lui traversa l’esprit :

« Comment, étant donné sa situation financière, la famille de Klein a-t-elle trouvé les moyens d’acheter un revolver ? » Se demanda-t-il en fronçant les sourcils.

Plongé dans ses pensées, il aperçut soudain une empreinte de main rouge sur le côté de la table. Elle était plus sombre encore que le clair de lune et plus opaque que le “voile”.

C’était une trace laissé par une main ensanglantée!

Instinctivement, Zhou Mingrui regarda sa paume droite agrippée au bord de la table : sa main était couverte de sang.

La douleur lancinante dans sa tête, bien que diminuant, était toujours présente.

« Me serais-je ouvert la tête ? » Se demanda-t-il ?

Il se dirigea alors vers le miroir fissuré et à peine avait-il fait quelques pas qu’une silhouette aux cheveux noirs, de carrure moyenne et aux yeux bruns apparut nettement devant lui. Cet homme lui semblait quelqu’un de cultivé.

« Serais-je devenu Klein Moretti ? »

Durant un moment, Zhou demeura stupéfait. Comme il faisait nuit et que l’éclairage était faible, il continua d’avancer et faillit entrer en collision avec le miroir.

À la lueur du voile cramoisi, il tourna la tête, examina ses tempes et vit nettement dans le miroir une blessure grotesque auréolée de traces de brûlure et de sang séché. Dans la plaie, on pouvait apercevoir des bribes de cervelle d’un blanc grisâtre qui bougeaient lentement.

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