Le Maître des Secrets | Lord of the Mysteries | 诡秘之主
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Chapitre 09 – Première mission
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Chapitre 09 – Première mission

Ding ! Dong ! La cloche reliée à une corde ne cessait de tinter et le son se répercutait dans le salon spacieux mais relativement vide.

Klein, qui parcourait le journal et étudiait les différentes opportunités d’investissement, se leva du canapé sur lequel il était assis. Il portait une chemise blanche et un gilet noir mais pas de nœud papillon. Le genre de tenue que l’on porte chez soi.

La première mission de ma carrière de détective ? Ceci dit, je ne peux pas rester en permanence chez moi à attendre le client. Voyons… Il faudrait que j’accroche à la porte un écriteau avec un stylo plume, de manière à ce que les gens puissent noter l’heure de leur prochaine visite. Cela me permettrait de m’y préparer… Mais pour un détective nouveau dans le métier et sans réputation, cela signifierait, sans doute, « pas de prochaine fois » … Il soupira : il va falloir que je prenne la peine, chaque matin, de faire une séance de divination pour savoir si je vais avoir des missions dans la journée et si oui, à quelle heure de manière à pouvoir faire des projets. Il est toujours possible que je manque des missions émanant de puissants Transcendants… Eh bien, qu’il en soit ainsi, c’est peut-être une bonne chose après tout…

Il se dirigea vers la porte et sans qu’il eût besoin de regarder dans le judas, l’image des visiteurs se forma dans son esprit :

L’un d’eux était une vieille dame portant un chapeau de feutre noir. Son dos était légèrement voûté et son visage profondément ridé. Elle avait la peau flétrie, jaunâtre et était vêtue d’une robe sombre habillée et soignée.

Ses tempes étaient toutes blanches mais ses yeux bleus très vifs. Elle regardait le jeune homme debout face à elle et lui faisait signe de tirer à nouveau la sonnette.

Ce dernier avait une vingtaine d’années et des yeux semblables à ceux de la vieille dame. Comme il faisait de plus en plus froid, il portait un manteau noir à double boutonnage, un semi haut-de-forme et un nœud papillon. On aurait dit qu’il s’il s’apprêtait à assister à une réception. Ce n’était pas le genre de personne à relâcher à tout moment ses exigences envers lui-même.

Sa prémonition de Clown aidant, Klein tourna la poignée, ouvrit la porte avant même que la cloche ne sonne à nouveau et accueillit ses visiteurs avec un sourire.

– « Bonjour Madame, Monsieur. Quelle journée magnifique, du moins jusqu’à présent car j’ai réussi à voir le soleil cinq minutes. »

Il parlait de la météo avec une légère exagération, banalités très populaires à Backlund et ce depuis plus d’un siècle.

– « Oui, il est toujours très timide. Il ne sort pas de derrière le brouillard et les nuages noirs », approuva la vieille dame.

– « Êtes-vous le détective Sherlock Moriarty ? » Demanda le jeune homme.

– « Oui, et en quoi puis-je vous aider ? Toutes mes excuses, entrez, je vous en prie. Asseyons-nous et discutons », dit Klein en s’écartant pour laisser passer ses visiteurs et en leur indiquant l’endroit réservé aux invités.

– « Ce ne sera pas nécessaire », répondit la dame d’un ton assez tranchant. « Je ne veux pas perdre de temps. Mon Brody attend que je le sauve, pauvre petite chose ! »

– « Chose ? » Klein eut soudain un mauvais pressentiment.

Le jeune homme en tenue habillée hocha la tête :

– « Brody est le chat de ma grand-mère, Madame Doris. Il a disparu la nuit dernière et j’espère que vous pourrez nous aider à le retrouver. Nous habitons au bout de la rue et je suis prêt à vous payer 5 Solis pour cela. Bien entendu, si vous pouvez me prouver que vous avez consacré plus de temps et d’efforts que prévu, je vous dédommagerai. »

Retrouver un chat ? La raison pour laquelle vous me confiez ce travail, c’est simplement que c’est très commode étant donné que nous vivons dans la même rue… De toute évidence, ce n’était pas là la carrière de détective que Klein avait imaginée.

Pour le coup, j’ai vraiment l’air d’un clown… Mais le point de vue du Voyant me dit que je ne peux pas refuser ma première affaire… Il réfléchit quelques secondes et demanda :

– « Pourriez-vous me le décrire en détails ? »

Avant même que son petit-fils ne puisse ouvrit la bouche, Mamie Doris prit la parole :

– « Brody est un chat noir adorable et plein de vie. Il est en très bonne santé, a de beaux yeux verts et adore manger du blanc de poulet cuit. Par la Déesse, il s’est enfui la nuit dernière sans crier gare. Ou plutôt il a dû se perdre. J’ai rempli son bol de poulet mais il refuse de revenir jeter un coup d’œil. »

Klein esquissa un sourire :

– « Excellente description, Mme Doris. J’accepte votre requête. Bon, allons chez vous à présent car il me faut chercher des indices et trouver des traces. Vous savez sans doute que mes déductions reposent sur les détails. »

– « Vous êtes le détective le plus proactif que j’aie jamais vu. L’affaire est entendue ! » S’exclama la vieille dame sans même consulter son petit-fils.

Klein mit son manteau, son chapeau, prit sa canne, et suivit Madame Doris et son petit-fils.

A la différence de Tingen, les routes, dans de nombreux quartiers de de Backlund, avaient été reconstruites avec du ciment ou de l’asphalte. Elles étaient donc moins boueuses, même par temps de pluie.

Tandis que la vieille dame ouvrait la marche, son petit-fils s’approcha de Klein et lui dit à voix basse :

– « J’espère que vous ferez tout votre possible pour retrouver Brody. Il est l’un des plus grands soutiens de ma grand-mère depuis le décès de mon grand-père et de mes parents. 

« Depuis que son chat a disparu, quelque chose s’est détraqué dans l’esprit de ma grand-mère, à tel point qu’elle a commencé à entendre des choses. Elle ne cesse de me répéter qu’elle entend le pauvre Brody miauler misérablement. »

– « Je ferai de mon mieux. Mais au fait, je ne connais toujours pas votre nom. »

– « Jurgen, Jurgen Cooper, Solliciteur Principal », répondit le jeune homme.

Ils atteignirent bientôt le 58 rue Minsk et entrèrent dans la sombre maison.

– « Voici le bol de Brody. Là, c’est sa boîte préférée. Il dort toujours dedans », expliqua Doris dont le visage ridé exprimait l’inquiétude et l’espoir.

Klein s’accroupit près de la boîte, en retira plusieurs poils de chat noirs, puis se releva et, de la même main, saisit sa canne incrustée d’argent.

Son regard se fit profond et il fit semblant d’examiner les environs tout en répétant mentalement une phrase divinatoire.

Il laissa discrètement glisser de sa main le pommeau de sa canne sans toutefois la lâcher totalement, de manière à ce que Jurgen ou Doris ne s’aperçoivent pas que celle-ci tenait debout toute seule.

Peu après, la canne noire incrustée d’argent bascula légèrement sur le côté, très lentement.

Klein la rattrapa, regarda durant une bonne dizaine de secondes dans la direction indiquée, puis se dirigea vers une vieille armoire.

– « Des signes de la fugue de Brody ? » demande Jurgen avec inquiétude tandis que Doris attendait elle aussi une réponse.

Sans un mot, Klein s’agenouilla et ouvrit la porte du bas de l’armoire.

Miaou !

Un chat noir en jaillit, queue dressée, et courut vers sa gamelle.

– « Brody !? Depuis quand es-tu dans cette armoire ? Comment t’es-tu enfermé là-dedans ? » S’écria Mme Doris, à la fois surprise et confuse.

Jurgen jeta à Klein un regard étonné :

– « Comment avez-vous su qu’il était dans l’armoire ? »

Klein eut un sourire :

– « Par déduction, mon ami. »

Ayant gagné les 5 Solis promis par Mme Doris et Jurgen ainsi que leur amitié, Klein retourna au 15 rue Minsk sous un temps maussade.

Il n’était pas arrivé qu’il vit une silhouette rôder devant sa porte.

Encore une affaire ? En observant, le jeune homme constata que son visiteur était un garçon de quinze ou seize ans, vêtu d’un vieux manteau et d’un chapeau rond, tenue qui ne correspondait pas à son âge.

Lui ? Pensa Klein qui le reconnut aussitôt comme étant le garçon qu’il avait rencontré dans le train le jour de son arrivée à Backlund. Il était alors poursuivi, mais la maturité et le calme dont il avait fait preuve avaient laissé une impression assez profonde sur notre détective.

Quelle mission pourrait-il bien vouloir me confier ? Se demanda-t-il en s’approchant, un sourire aux lèvres.

– « Excusez-moi, est-ce moi que vous cherchez ? »

L’adolescent sursauta et se retourna aussitôt, ses yeux rouge vif pleins d’une peur non dissimulée.

Il se ressaisit et demande avec hésitation :

– « Êtes-vous le détective Sherlock Moriarty ? »

– « Oui », répondit Klein en regardant autour de lui : « Allons discuter à l’intérieur. »

– « D’accord », approuva l’adolescent.

Une fois dans la maison, Klein garda son manteau mais ôta son chapeau et rangea sa canne.

Il conduisit ensuite l’adolescent dans le salon réservé aux visiteurs et lui indiqua le long canapé :

– « Asseyez-vous, je vous en prie. Quel est votre nom et quelle mission souhaitez-vous me confier ? »

– « Appelez-moi Ian », répondit l’adolescent en examinant les environs. Puis, au bout de quelques secondes, il ajouta : « Il y a quelques temps, un autre détective, M. Zreal Viktor Lee, m’a engagé pour recueillir des informations. »

Klein s’assit à son tour et joignit les mains :

– « Ce que vous attendez de moi a-t-il un rapport avec votre ancien employeur ? ».

– « Oui », répondit gravement Ian. « Il y a quelques jours, je me suis brusquement aperçu que j’étais suivi par des gens mal intentionnés ; j’ai donc réfléchi à un moyen de les semer… Euh… Si je ne me trompe, vous étiez présent, Monsieur Moriarty. Aussitôt que je vous ai vu, je vous ai reconnu comme l’homme qui me jaugeait dans le métro ce jour-là. »

… Son sens de l’observation est pratiquement du niveau d’un Spectateur… Serait-il né avec une capacité spéciale ? A moins que ce ne soit un Transcendant ?

Klein activa sa Vision Spirituelle, observa Ian mais ne lui trouva rien d’étrange.

– « Votre réaction m’a grandement impressionné », répondit-il calmement.

Ian ne s’attarda pas sur le sujet et poursuivit :

– « Pensant que cet évènement avait quelque chose à voir avec M. Zreal, je suis allé lui rendre visite chez lui. En apparence, l’endroit était normal, mais de nombreux indices indiquaient que quelqu’un s’y était infiltré et avait déclenché tous les petits mécanismes.

Depuis ce jour, je n’ai plus revu M. Zreal, aussi je pense qu’il lui est arrivé quelque chose.

« J’ai appelé la police, mais sa disparition est encore trop récente pour déposer un signalement. J’ai alors tenté d’obtenir l’aide d’autres détectives de ma connaissance, mais tous ont refusé, prétendant qu’ils venaient de voir M. Zreal à une soirée organisée par un collègue détective.

« Cela m’a surpris car lorsque j’ai contacté mon employeur par un moyen convenu entre nous, je n’ai reçu aucune réponse.

« Me fiant à mon jugement, je me suis dit qu’il me fallait demander l’aide d’un détective inconnu de M. Zreal. Oui mais voilà : comment le connaîtrais-je dans ce cas ? Ne sachant à qui m’adresser, j’ai parcouru les journaux et c’est là que je vous ai trouvé, M. Sherlock Moriarty. »

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