Livre 2, Chapitre 48 – Es-tu humain ?
Des préposés apportaient à Aurore ses trois objets scellés dans des vitrines. L’un d’eux s’était approché d’elle amicalement. « Ma Dame, aurez-vous besoin de nos services d’authentification ? Les évaluateurs de l’Ordre sont très fiables. »
« Pas besoin », leur coupa Cloudhawk. « Nous les ferons authentifier nous-mêmes. »
Aurore Polaris n’était pas satisfaite de son choix. Hé, se dit-elle, « souviens-toi qui est le patron ici ! Qui a dit que tu pouvais prendre la décision ? »
Skycloud city était un lieu martial, et les chasseurs de démons étaient d’un genre martial. La rue qu’ils appelaient la Maison des Chasseurs de Démons avait de nombreuses chambres à louer, chacune remplie de divers outils. Il avait prévu de trouver un endroit pour tester ces reliques. Il avait demandé à Aurore de leur acheter un espace de deux cents mètres carrés avec quelques mannequins d’entraînement pour une pièce d’or.
Ils ne cherchaient pas d’évaluateur. Pourquoi acheter une salle d’entraînement ?
Ignorant le scepticisme de la jeune femme, il regarda la boîte avec insistance. « D’accord, voyons voir. »
Son joli visage s’était froncé comme s’il parlait une langue étrangère.
« Qu’est-ce que tu fais là, debout comme une idiote ? Après avoir dépensé autant d’argent, tu ne veux pas savoir ce qu’ils font ? »
Elle le regarda comme s’il était un alien. « Savoir quoi ? Tu ne veux pas dire ces reliques ? »
« C’est une question à la con. »
Elle était vraiment sidérée, à tel point qu’elle n’avait pas répondu à son insulte. Soudain, elle était convaincue qu’il était fou. Quelle relique vendue aux enchères pouvait simplement être ramassée et utilisée ? C’était lui l’imbécile !
Il ne fit pas attention à son choc. Il ouvrit la première caisse et en sortit le grand bouclier. L’objet marqué par la bataille mesurait cinquante centimètres de haut.1 Il était entièrement noir et fait uniquement de métal. Cependant, quand il le prit en main, il était étonnamment léger.
À l’intérieur du bouclier, il vit des runes typiques de nombreuses reliques. Il avait utilisé ce qu’il avait appris pour lire le nom, « Bouclier de commotion ».
« Quelle perte de temps ! Espèce de péquenaud du fond des bois, qu’est-ce que tu connais aux reliques ? » Aurore jeta un coup d’œil au bouclier mutilé et offrit un rictus plein de promesses malicieuses. « Tu crois que tu peux ramasser une étrange relique au hasard et l’utiliser ? Je ne sais pas si tu es naïf ou juste stupide. Si tu peux faire fonctionner cette chose, alors tu peux être mon patron ! »
« Peu importe, ça ne m’intéresse pas d’être le patron de quelqu’un qui vient de me couper les jambes. » Il s’était retourné et l’avait regardée. « Je veux seulement que tu me traites comme un égal ! »
Aurore affronta son regard noir sans détour. Ce n’était pas un regard normal. Les yeux de Cloudhawk étaient pleins de confiance en soi et de calme. Il était unique, mais elle n’était pas sûre de savoir ce qu’il avait de particulier qui lui faisait ressentir cela.
L’intérieur du bouclier était équipé d’une sorte de manche. Glisser son bras gauche à l’intérieur fixait le bouclier en place. Il avait d’abord haussé le bras pour s’habituer à son poids. Ses yeux balayèrent la zone d’entraînement et finirent par se poser sur un mannequin d’entraînement à proximité.
Ces mannequins étaient spécialement conçus pour les chasseurs de démons afin de les aider à pratiquer leurs compétences. Ils étaient fabriqués en bois, mais uniquement de la meilleure qualité. Ils étaient assez résistants pour encaisser plusieurs coups de bâton d’exorciste. Ce fait était suffisant pour prouver à quel point ils étaient résistants.
« Commençons. »
Il s’était mis à courir sous le regard incrédule d’Aurore. Alors que sa vitesse s’accélérait, il tenait le bouclier devant lui. Ses yeux étaient fermés, toute sa concentration sur le bouclier, à la recherche de sa résonance – et puis, quelque chose d’inattendu se produisit.
Le bouclier s’était mis à briller d’une lumière blanche.
Il fonça sur le mannequin, et lorsque son bouclier toucha le bois, il libéra un éclat de lumière sous forme d’ondulations visibles. Tout l’espace autour de lui s’était déformé et, tout à coup, le rugissement du vent avait envahi la salle d’entraînement.
Bang !
Les oreilles d’Aurore avaient sonné alors qu’un coup de tonnerre éclatait. Frappé de plein fouet par la force de l’impact, le mannequin d’entraînement avait été projeté au loin. Il heurta le mur et s’écrasa sur le sol, couvert de fissures. La bosse qu’il avait laissée dans le mur montrait la force qui se cachait derrière sa charge.
Dans un vrai combat, peu importe qu’il soit face à un homme ou un taureau. Les tripes de ce dernier auraient éclaboussé le sol après un tel coup. Croyez-le ou non, ce bouclier en mauvais état était parfaitement fonctionnel.
Aurore Polaris le regardait fixement, la bouche pendante, assez large pour contenir une pomme.
« Eh bien, c’était satisfaisant ! » Il s’approcha au trot, retira le bouclier et le lui tendit. « Tu veux l’essayer ? »
Elle déglutit et regarda le mur endommagé. D’après l’affichage, elle pouvait dire que cette relique était du type qui pouvait manipuler l’air et le vent – précisément le genre de relique avec laquelle Aurore était compétente. En fait, le miroir qu’elle utilisait pour se protéger utilisait ce qu’on appelle une « protection de type vent ». Il épaississait l’air en une coquille invisible pour parer les attaques. Bien qu’il s’agisse techniquement d’une armure, le Bouclier de Concussion pouvait également attaquer.
Donc, étonnamment, c’était une belle relique ! Sans dire un mot de plus, elle mit le bouclier sur son bras. Elle ne copia pas la charge sauvage, préférant s’approcher et se placer devant l’un des mannequins.
Elle tendit son énergie psychique et fit pivoter le bouclier.
L’explosion de puissance était cette fois-ci plusieurs fois plus puissante que la précédente. Il était trop près et fut presque projeté au sol, tandis que le mannequin explosait en éclats. Des morceaux de bois recouvraient la pièce.
Aurore était presque folle de joie. « C’est incroyable ! »
Il avait un talent pour les reliques. Il pouvait en ramasser une et l’utiliser plus vite que n’importe quel autre chasseur de démons. Cependant, en termes de force, il n’avait qu’un cinquième de la puissance de cette femme. Si Aurore devenait compétente avec ce bouclier, quelle sorte de force terrible pourrait-elle produire ? Les différences entre leurs compétences étaient évidentes !
La fois suivante où Aurore regarda Cloudhawk, le dédain avait disparu de son regard. À la place, il y avait du respect, un véritable respect. Elle n’avait jamais ressenti cela pour un pair auparavant, surtout quelqu’un d’aussi jeune qu’elle.
« Comment a-t-il pu faire ça ? »
De l’extérieur, cette relique semblait inutile, mais il avait regardé au-delà de sa surface. Aurore avait payé une somme qu’elle n’aurait pas cru, même dans ses rêves les plus fous. Ce n’était pas seulement de la chance. C’était comme un cadeau du ciel !
Et sa surface cicatrisée ? Ce n’était pas un problème. Quelques centaines de pièces d’or suffiraient à convaincre les artisans du Sanctuaire de le réparer. Comme son noyau était encore intact, le réparer pour le remettre à neuf ne serait pas difficile.
« Continuons ! »
Il avait ensuite ramassé le petit morceau de pierre. Aurore Polaris s’était rapprochée. Cela ne la dérangeait pas d’être si près de lui maintenant. Ses yeux brillants étaient plutôt concentrés sur la relique. Elle l’avait regardé attentivement pendant un moment. « Cette pierre est une relique ? Elle n’en a pas l’air ! »
« Roche Titan » ? Intéressant ! »
Cloudhawk vit le nom griffonné dessus mais ne fit pas beaucoup plus d’investigations. Il chercha sa résonance avec son pouvoir psychique, et lorsqu’ils se mélangèrent, il se sentit instantanément alourdi. Il l’avait instinctivement jeté au loin, et lorsqu’il avait touché le sol, il l’avait fait avec une détonation assourdissante.
Le caillou de la taille d’un poing avait atteint la taille d’un lavabo au moment où il avait atterri.
Des runes scintillantes glissaient sur sa surface, et il tremblait d’avant en arrière comme un animal en colère. Il continua à grandir sous leurs yeux, jusqu’à atteindre la taille d’un bœuf.
Cloudhawk et Aurore l’avaient regardé avec stupeur. Cette relique était-elle destinée à être jetée sur leurs ennemis pour les écraser sous elle ? Quelle déception…
Crack-crack-crack !
La roche avait cessé de s’étendre mais continuait de se transformer. Alors que des fissures s’étendaient sur toute sa surface, ce qui arriva ensuite les surprit encore plus. Le rocher se dressait en fait sous la forme d’un homme de cent quatre-vingts centimètres de haut. C’était maintenant un soldat entièrement fait de pierre avec une paire d’yeux rouge brillant. Ses bras étaient épais et menaçants.
Un poing de la taille d’un rocher avait été projeté, et un mannequin avait volé. Une jambe aussi épaisse qu’une colonne de pierre avait donné un coup de pied, et un mannequin de pierre avait été réduit en poussière.
Aurore regardait avec de grands yeux extatiques. La relique avait invoqué une arme – un soldat de pierre doté d’une force étonnante et capable de suivre des ordres. S’il pouvait invoquer un golem aussi fort, de quoi était-elle capable ? C’était une autre relique de haut niveau !
Ce qui la ravissait le plus, c’était le fait que ce « Titan Rock » avait une affinité avec la terre.
Les talents d’Aurore lui permettaient d’utiliser deux sortes de reliques : le vent et la terre. Le miroir d’égide manipulait le pouvoir du vent, et le Terrangelica manipulait le pouvoir de la terre. Il avait réussi à l’aider à trouver deux reliques parfaitement adaptées à ses talents.
C’était presque comme si elles avaient été faites sur mesure pour elle !
Son enthousiasme et sa joie étaient faciles à imaginer, et elle dut s’empêcher de l’embrasser. Mais, au milieu de son exaltation, une autre pensée lui traversa l’esprit. Quand elle le fit, sa joie se transforma en choc, puis en étonnement, et enfin en un froid inexplicable.
« Tu… tu… tu… »
Elle s’était éloignée de lui. Ses yeux se fixèrent sur lui avec un regard menaçant. Cette diablesse, qui ne craignait rien ni personne à Skycloud City, resta sans voix.
Cloudhawk lui lança un regard bizarre. « Quoi ? »
Aurore Polaris avala difficilement. « Es-tu humain ? Combien de talents as-tu en réalité ? ! »
1. Les mathématiques ont du mal à correspondre à la description du bouclier. On en parle comme d’un « gigantesque bouclier de bras ». Je suppose que le bouclier de bras se réfère probablement plus à un bocle – un bouclier plus petit qui est glissé sur le bras ou tenu dans la main et utilisé pour dévier ou parer. Les boucliers peuvent généralement mesurer jusqu’à 45 centimètres, donc je suppose que “gigantesque” signifie cinq centimètres de plus que la normale.