La Tour des Mondes
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Chapitre 324 : L’héritage des Champions
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Après avoir passé plusieurs journées à réfléchir en observant l’arbre du hall des Rangers, Milo soupire. Dans ce lieu où le temps ne fait plus de sens, il est content de pouvoir le passer à contempler l’éternité. Surtout quand il est curieux… Principalement parce qu’il est curieux à dire vrai.

Il n’était pas dupe et savait pertinemment que Balad n’hésiterait pas à venir voir le nouveau champion des Dresseurs. Le premier champion des Dresseurs va et vient à sa guise dans ces lieux spirituels et connaît ses propres passages.

C’est aussi pour ça qu’il n’est pas entré dans le panthéon des Dresseurs, mais à présent il a suffisamment attendu pour que Balad soit parti. Il n’a rien contre lui bien sûr, mais quand les grimpeurs font de la politique, Milo a tendance à choisir de ne jamais s’impliquer.

Il fait un signe à Narissa qui se laisse tomber d’une branche où elle était installée et il avance en direction du Panthéon des Dresseurs. Chaque hall de classe à une particularité dans cette dimension, mais celui des Dresseurs semblait bien vide en comparaison des autres. Pour une classe principale tournée vers les animaux, c’était suffisamment étrange pour qu’il ait envie de voir ce qu’il se passe là-dedans maintenant que Nomad en est officiellement devenu un champion.

Il ouvre les portes en grand et se fige quelques instants de surprise. Un sourire en coin apparaît sur son visage alors que le lieu qui était lugubre jusqu’à présent est maintenant plein de vie.

Devant lui, des centaines et des centaines de rats sont ici et là à faire des trucs de… rats. Il ne sait pas quoi en dire de plus, mais n’y prête pas attention alors qu’il avance en direction de la stèle. Ici et là, il peut également voir des oiseaux et des animaux plus grands ou plus gros, mais il semblerait bien que chaque animal dressé par Nomad de près ou de loin ait sa propre copie ici. Il suffit de voir le nombre de chiens, de chevaux et ainsi de suite qu’il reconnaît comme appartenant à des Rangers ou des Cavaliers. Ici et là, il y a même des crabes et il peut même entendre du mouvement venir d’une grande surface d’eau qui doit représenter un plan d’eau salé… un océan, s’il se souvient bien.

Ils sont probablement comptés à cause de la meute qui a ravagé une partie du pied de la tour. Même si ce n’était que pendant un court instant, ils étaient liés au Dresseur d’une façon ou d’une autre.

Cela dit, ça fait quand même beaucoup de rats…

Milo fait attention où il marche en sautillant parfois pour éviter des groupes de rats sur le chemin. Il finira bien par prendre la peine de les compter et ce sera bien plus simple maintenant que l’ambiance sombre laissée par Balad a disparu pour devenir éclatante et brillante alors qu’un soleil printanier illumine les lieux.

En approchant de la stèle, il observe rapidement la statue de Nomad en la comparant à celle de Balad. La distinction entre les deux statues qui se font face est assez claire. Des opposés qui sont voués à s’affronter dans le futur.

Derrière Milo, Narissa est en train de jouer avec des rats en oubliant complètement pourquoi Milo est ici, mais ça ne le dérange pas et il peut la comprendre. Très peu de halls des champions regorgent d’autant de vie. Cette tour n’est qu’un panthéon censé être une sorte de mémorial à la grandeur des Grimpeurs, mais ce lieu sera à présent réchauffé par la vie animale. Chaque passage de Nomad dans ce lieu apportera très certainement à chaque « sauvegarde » un nombre incroyable d’animaux supplémentaires. D’une certaine façon, il trouve encourageant que cette classe retrouve finalement le droit chemin.

En souriant, Milo s’approche de la stèle en ne tenant plus et en voulant savoir ce qu’il a écrit.

Il commence par lire ce que Balad a fait graver en repensant aux heures de réflexions qu’il a passé à l’interpréter dans l’éternité du lieu. Il pose finalement ses yeux sur ce que Nomad a décidé de faire graver pour les futurs champions qui passeront les portes de ce lieu.

Pendant un instant, il se met simplement à sourire chaleureusement. Les sens et les significations traversent son esprit, mais ils les chassent pour profiter de la sagesse d’un jeune champion. Par simple respect, il fait d’abord une légère révérence pour faire honneur à ses propos et il finit par lire à voix haute les quelques mots.

«  Ils sont ma force. Ils sont ma clé. Ils sont ma famille. »

Il se remet à sourire en regardant autour de lui les animaux et la vie qui vient d’apparaître ici. Il regarde également la statue qui fait elle aussi honneur à cette simple phrase.

Si… ou plutôt « quand » il écrira un livre biographique sur ce champion des Dresseurs, il commencera par cette phrase. Malheureusement, son sourire devient creux puisqu’il sait aussi que les prochaines pages du livre ne seront pas les plus joyeuses.

Alors qu’il regarde Narissa jouer en se battant avec un chien, il s’arrête quelques instants pour chercher à comprendre une chose. Même en fouillant les recoins du hall des Dresseurs, il n’a trouvé aucun animal par le passé, aussi microscopique pouvait-il être. Maintenant, elle en regorge. Ne parlons même pas de l’espèce de bassin rempli de sang qu’il voit au loin dont il ne veut même pas connaître l’histoire.

… Doit-il comprendre que Balad n’a jamais dressé le moindre animal alors qu’il est le premier champion de cette classe ? Il semble y avoir un nouveau mystère à explorer maintenant.

« Quand une porte s’ouvre, une autre porte fermée apparaît toujours ailleurs dans la tour, semble-t-il. »

Un barrissement provenant vraisemblablement d’un éléphant le réveil de ses songes. À présent, il est temps pour lui de cataloguer les animaux qui se trouvent ici. Un Archiviste n’est rien sans archives après tout.

Il a l’éternité devant lui dans cette dimension et, à vue d’œil, cela lui prendra peut-être six mois de répertorier tous les animaux présents ici. Ne parlons bien sûr pas des années qu’il passera ensuite à écrire sur la physiologie et psychologie animale et ne parlons pas non plus des révisions qu’il devra faire sur d’autres ouvrages déjà écrits, ou encore…

Pour faire simple, il a beaucoup de travail à présent. Cela lui permettra d’ajouter plusieurs dizaines de rayons à la plus grande bibliothèque des mondes qui se trouve dans le hall des archivistes. L’éternité offerte ici est un cadeau qu’il ne compte pas refuser.

Du haut de ses 6 459 ans cumulés ici, Milo regarde son œuvre avec indifférence. La visite du nouveau champion annonce qu’il va probablement passer une où deux décennies de plus à écrire, mais ce n’est qu’une goutte dans l’océan avant un retour au pied de la tour, une nuit de sommeil et un lendemain de plus à attendre qu’un champion se présente.

Ici, il n’a de toute façon pas faim et ne ressent pas la fatigue. La présence de Narissa lui suffit à ne pas connaître la solitude et tant qu’il a du travail, il est inutile de revenir au pied de la tour.

C’est un système amusant lui ayant coûté de nombreuses années de réflexions que ce lieu et son éternité étrange. Même en passant autant de temps ici, il ne s’écoulera qu’une seconde là dehors quand il en sortira. Le temps du trajet pour ainsi dire.

Milo savait qu’il rencontrerait Nomad ici, car il avait eu l’information de son passage chez Dolan bien plus tard dans la journée alors que le Dresseur avait déjà quitté l’atelier. Une sorte de « pincement temporel » qui regroupe les apparitions des champions ici, sur une seule journée dans l’éternité. Si le temps était une nappe alors chaque champion serait juste un fil rejoignant ce lieu au temps figé. Peu importe la notion de matin ou d’après-midi.

Il était même là avant eux à cause d’un phénomène qu’il a fini par nommer « la temporalité ajustée », mais qu’il considère surtout comme étant le sens du dramatique de la Tour.

Cela fait bien longtemps qu’il a fini de théoriser sur le sujet et il ne compte plus les heures de réflexions jusqu’au fameux « eurêka » invérifiable entraînant l’écriture d’un nouveau livre.

Cependant, dans sa quête de savoir, il sait faire la part des choses. Même en théorisant des épiphanies pour le plaisir, l’important pour lui n’est pas forcément de savoir comment fonctionne le temps et l’éternité ici, mais bien que cela continue de fonctionner.

Il regarde rapidement en direction de Narissa qui semble à présent se battre avec un fauve pour un os. Il est temps de commencer.

*

— Il s’est passé quoi là-dedans ?

— Hm. Rien rien.

Nous marchons dans les rues alors que je réfléchis. C’est avant tout la menace de Balad sur les nouveaux Dresseurs qui m’inquiète, mais je n’ai pas encore de plan d’action. J’ai cependant pris le temps de penser suffisamment fort à Cyrus pour qu’il apparaisse et je lui ai confié une lettre à remettre à Silice ou à un autre Dragon dans le club de strip-tease pour lui donner des informations sur Balad et sur ce qu’il m’a dit.

Malheureusement, je n’ai pas réglé cette histoire d’armure pour autant, mais je dois obtenir la classe de Couturier si je veux dresser convenablement Persée. Yuu semble avoir fini d’établir des leçons et il est ma seule opportunité d’obtenir la classe. La limitation de la tour des Bardes faisant que je ne peux pas rejoindre une des classes si j’en ai choisi une d’une autre tour secondaire en premier m’en empêche. À moins d’apprendre dans un atelier, je n’ai pas d’autre choix que d’avoir Yuu comme professeur.

Un jour, je pourrai incorporer Persée à mon armure, mais cela attendra.

— Ta tenue « tactique » sera prête dans trois jours. Ce n’est pas souvent que nous avons un aussi bon client que toi et je ferai en sorte de t’offrir la tenue de tes rêves.

— Merci Gladis.

Je dis au revoir à la couturière qui est largement plus en sécurité quand je ne suis pas dans les parages et je me tourne vers Blue pour lui dire que nous retournons au bar de Mad’ voir les autres. Avec un peu de chance, je pourrai finalement reprendre mon assassinat de guilde dans quelque temps.

Maintenant que j’y pense, Yuu. Tu sais comment Fae m’a transformé en champion, n’est-ce pas ?

[Bien sûr ! Tu as bu son sang.]

Je n’ai aucun souvenir de cela. Même pendant l’entraînement, je l’aurai senti si Fae avait tenté quelque chose d’aussi étrange. Nerys m’a appris à ne pas réellement dormir et les animaux de la meute montaient la garde.

[Tu vas trop loin dans tes explications. Pense plus simple. Par exemple… une tasse de thé avec Ephy et Fae ?]

… Elle a vraiment fait ça ? Fae a mis son sang dans le thé qu’elle m’a offert à la fin de mon entraînement ? C’est… pas cool.

{Pas cool ! Pas cool !}

Je caresse la tête de Micha qui semble prête à organiser une révolution.



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