Auteur : Thremendous
Traductrice : Moonkissed
Pour que Young-hoon Hyung-nim devienne le meilleur du monde, ce ne fut vraiment qu’une question de moments.
‘C’est encore plus rapide que dans la vie précédente.’
En seulement cinq ans, il parcourut tout le Yanguo, visita les grandes factions de chaque province et de chaque ville, affronta les maîtres du pinacle et les vainquit tous.
En trois ans, il s’assit à l’un des trois sièges des plus grands bretteurs du monde, et dans les deux années suivantes, il surpassa les deux restants pour gagner le titre de Guerrier numéro un du Yanguo.
Puis, admirant son royaume, les chefs des Quatre Étoiles et Trois Démons de Seokyung — qui avaient atteint les Trois Fleurs — s’allièrent pour l’attaquer. Il se battit seul contre eux sept et l’emporta, consolidant sa position de meilleur incontesté sous le ciel.
— …Je me sens un peu vide.
— Tu parles comme quelqu’un repus (privilégié), hyung-nim.
Lui répondis-je, en pratiquant l’Épée Tranche-Montagne devant lui.
Grâce aux conseils constants de Young-hoon hyung-nim durant ces cinq années où nous n’étions pas en joute, mes arts martiaux étaient passés du milieu au fin de deuxième rang. À présent, mes techniques s’étaient incarnées dans mon corps : je pouvais employer techniques et énergie interne sans effort.
— Repus ? Je t’envie plutôt, Eun-hyun. Tu es au fin de deuxième rang, avec encore plein d’adversaires pour te polir. Mais moi, tout le monde est plus faible… Contre qui suis-je censé me mesurer ?
— Les chefs des Quatre Étoiles et Trois Démons en auraient la tête qui explose s’ils t’entendaient.
— C’est une triste vérité. Le Traité pour Transcender la Cultivation et Épuiser les Arts Martiaux est un système terriblement hétérodoxe… On dirait qu’aucun artiste martial ne peut le surmonter.
Il leva les yeux vers le ciel, l’air un peu indifférent.
— Même l’étape suivante, les Cinq Énergies convergeant vers l’Origine, après les Trois Fleurs Rassemblées au Sommet, me semble bientôt à portée avec ce Traité… Une fois là, même les plus grands maîtres du Yanguo — qui posaient encore un défi en attaques groupées — seront faciles à vaincre…
Dans les yeux de Young-hoon hyung-nim s’était installée une forme de langueur.
— Que devrais-je faire maintenant ?
Je sentis un mauvais pressentiment.
‘Non ! Si les pensées de hyung-nim dérivent vers l’Alliance du Wulin…’
Cette vie aussi serait vouée à trimer comme un bœuf, comme dans la précédente.
Ayant occupé un haut poste autrefois, et mes compétences ayant atteint le fin de deuxième rang cette fois, je pourrais sans doute mieux m’en sortir…
‘Mais cela voudrait dire être exploité encore plus… !’
Il me fallait vite trouver autre chose pour détourner ses idées !
— Et si on voyageait ?
— Voyager dans le monde martial ? J’ai assez voyagé à travers le Yanguo ces cinq dernières années…
— Non, pas au Yanguo. Que dis-tu des pays voisins, comme Shengzi ou Byeokra ? Ils ont leurs propres mondes martiaux.
— Ah, visiter les mondes martiaux voisins…
— Oui, tu y trouveras peut-être des maîtres à ton goût, hyung-nim.
— Hmm… même si je doute que quiconque puisse atteindre le niveau du Traité pour Transcender la Cultivation et Épuiser les Arts Martiaux…
Après avoir réfléchi un moment, il acquiesça.
— D’accord. Un tour martial des pays voisins n’est pas une mauvaise idée.
Ainsi, Young-hoon hyung-nim et moi passâmes six mois à apprendre les langues et écritures de Shengzi et de Byeokra, parcourant ensuite leurs mondes martiaux.
Deux années de plus s’écoulèrent.
Young-hoon Hyung-nim vainquit douze maîtres du pinacle Trois Fleurs à Byeokra, obtint l’illumination et atteignit le royaume des Cinq Énergies.
À présent, il avait rajeuni, devenant même plus jeune que moi.
Il avait gagné le titre de meilleur des trois pays — Yanguo, Byeokra et Shengzi.
Pourtant, son visage ne semblait pas heureux.
— Eun-hyun, que dois-je faire maintenant ?
Un sentiment écrasant de vacuité.
La sensation d’une apathie née de l’absence d’adversaires à sa mesure.
Et la satisfaction de progresser vers le sommet du Traité pour Transcender la Cultivation et Épuiser les Arts Martiaux.
On aurait dit qu’il avait perdu tout intérêt pour les affaires du monde martial.
— Et si tu fondais une faction, hyung-nim ?
Je lui proposai une autre tâche.
— Une faction ?
— Oui, rassembler des talents de tout le pays, les instruire, et en faire des maîtres capables de te tenir tête.
— Hmm, même si je forme des talents, quand ils feront un pas, moi j’en aurai déjà fait dix ?
— …C’est vrai, malheureusement.
Aussi arrogant que cela sonne, son talent martial était réellement ahurissant.
— Malgré tout, il faut comparer pour distinguer le long du court (autrement dit : on ne juge la nature des choses qu’en les vérifiant soi-même). Et puis, si nous avons la puissance et la richesse d’une faction, nous pourrons inviter ces maîtres reclus pour toi, hyung-nim.
— Hmm…
C’était fort juste.
Bien sûr, ces « maîtres reclus » n’étaient pas des artistes martiaux, mais des cultivateurs dont j’avais appris l’existence dans ma vie passée, opérant en secret à travers le monde martial.
Ces cultivateurs interviennent rarement dans les affaires personnelles…
Que naisse un numéro un du monde martial, peu leur importait.
Mais ils intervenaient toujours face aux organisations susceptibles de bouleverser le monde martial.
C’est pourquoi nous n’avions croisé aucun cultivateur durant notre périple dans les trois pays.
— Fort bien. Alors fondons une faction sous ma renommée.
Ainsi naquit une faction au nom de Young-hoon, le numéro un mondial.
La faction s’appela Palais de l’Extrême Martialité, en écho au nom du Traité pour Transcender la Cultivation et Épuiser les Arts Martiaux (qu’on peut aussi lire « Arts Martiaux Extrêmes »).
Sous l’aura du numéro un, d’innombrables artistes martiaux affluèrent, dont sept qui avaient atteint les Trois Fleurs.
Le Palais de l’Extrême Martialité devint rapidement la première faction du Yanguo, et, en tant que vice-chef, je passai trois ans à la stabiliser.
Au bout de trois ans, le Palais de l’Extrême Martialité était une puissante faction renommée à travers le Yanguo.
Lorsque son influence atteignit un niveau capable d’affecter tout le monde martial, ils vinrent.
— Des cultivateurs ? demanda Young-hoon hyung-nim en voyant les visiteurs apparus un jour.
— Quels sont ces cultivateurs ? Je perçois chez eux… une aura singulière.
Ils portaient des robes de couleurs différentes couvrant tout le corps, avec chapeaux et voiles dissimulant leur visage.
Le seul indice d’identification possible était la voix, mais même celle-ci semblait altérée par un sort, la rendant similaire d’une personne à l’autre.
Nous faisant face soudainement, hyung-nim s’y intéressa.
— Donc… vous voulez que notre Palais de l’Extrême Martialité prête allégeance à votre organisation de cultivateurs ?
En effet.
Ses yeux brillaient. Voyant en eux un « esprit jamais rencontré », son regard, débarrassé de sa langueur, flamboyait d’une ardeur compétitive.
— C’est exact. Nous sommes à l’origine un clan de cultivateurs qui suivent la voie de l’immortalité. Nous n’intervenons pas dans les affaires du monde, mais nous avons ressenti le besoin d’un minimum de guidance et de contrôle. Ainsi, nous opérons en secret dans les familles royales, la finance, la politique et le monde martial, les soutenant pour maintenir leur puissance.
— Heh heh…
— En retour, ce n’est pas grand-chose. Vous devez simplement prêter allégeance à notre clan pour des générations et nous aider lors de nos rares interventions.
— Heh heh heh… Fascinant. J’ignorais l’existence d’un tel monde.
Hyung-nim ricana en regardant les trois cultivateurs.
— Et si je refuse ?
À sa réplique, une pointe meurtrière sembla s’exhaler des trois.
— Nous partirons aujourd’hui, mais votre faction sera bannie par toutes les autres. Aucune guilde marchande ni aucun grand clan ne voudra être vos disciples. Le gouvernement et la famille royale chercheront aussi à vous abattre par tous les moyens.
— Hmm, si ce n’est que ça, ça ne paraît pas bien effrayant.
Hyung-nim sourit en coin et croisa les bras.
— Ne pas craindre d’affronter tout le Yanguo… Outrage sans nom.
— Comment ce mortel ose-t-il afficher tant d’arrogance devant des cultivateurs…
Le cultivateur placé derrière celui qui parlait libéra son intention meurtrière et leva la main.
Whoosh !
Soudain, une lueur stellaire jaillit ; une pluie d’étoiles coula de sa paume.
Au même instant, le sabre de hyung-nim sortit de sa taille comme l’éclair.
Boom !
Le flanc du hall où nous parlions explosa.
— Reste près de moi, Eun-hyun. Derrière moi, tu seras en sécurité.
— Je sais.
Souriant, un peu amer, dans le nuage de poussière, je vis les trois cultivateurs fulminer.
— On dirait qu’ils ont une idée un peu… différente.
— Comment un mortel ose-t-il tirer le sabre sur des cultivateurs !
— C’est vous qui avez attaqué les premiers.
— Silence ! Nous n’avons pas besoin d’un chien qui aboie… tue-le et change-le en pantin !
— Vous parlez d’immortalité, mais vos pensées ne diffèrent en rien de celles des démons.
Les trois marmonnèrent des incantations et formèrent des sceaux de main.
Le premier commença à lancer un nouveau sort.
Whoosh !
Mais avant que le sort ne s’épanouisse, il fut tranché par le sabre de hyung-nim.
— Qu—qu’est-ce que… !
Avant qu’ils ne réagissent, hyung-nim se glissa dans leur angle mort et frappa les trois d’un coup de pied au ventre.
— Ugh !
— Agh !
— Aaaah !
Les trois semblèrent tomber sous le hall, mais ralendirent leur chute par un sort étrange en cours de route.
Leurs vêtements étaient pleins de poussière, et les zones où hyung-nim les avait frappés étaient complètement déchirées.
— Écoutez, cultivateurs !
La voix de hyung-nim, gonflée d’énergie interne, tonna comme un rugissement de lion.
— Je ne prêterai jamais allégeance à des gens comme vous ! Faites de moi l’ennemi du monde martial ou du Yanguo si vous l’osez ! Je ne crains pas vos venues !
Boom, boom, boom !
En même temps, ses claquements de doigts frappèrent le sol près d’eux dans un fracas assourdissant.
— Personne n’a le droit de se tenir au-dessus de moi !
Les trois, bouillonnants de rage, usèrent d’un sort étrange pour fuir.
Je m’approchai prudemment et demandai :
— …Hyung-nim, l’après-coup, tu peux le gérer ?
— Hahaha, après-coup, dis-tu ?
Ses yeux étaient emplis d’une fièvre indéniable.
C’était presque de la folie.
— Quel après-coup ! J’ai compris, Eun-hyun !
— Qu—que veux-tu dire ?
— Cette soif que rien n’étanchait, quel que soit le nombre d’artistes martiaux affrontés avec le Traité ! Cette satisfaction qui ne venait jamais, peu importe combien je me battais ! Oui, c’était la soif née du fait d’utiliser un art non destiné aux mortels contre des mortels !
Le visage enflammé, il serra le poing.
— Les cultivateurs ! Oui, ce Traité est fait pour vaincre ces vauriens de cultivateurs ! Enfin ! Enfin, j’ai trouvé le but de mon art ! J’ai découvert l’intention de mon art, et tu me parles d’après-coup !
— … ?
— Cet art est pour combattre les cultivateurs ! Donc, pour grandir, je dois combattre des cultivateurs. Hahaha ! Enfin, la voie pour maîtriser le Traité pour Transcender la Cultivation et Épuiser les Arts Martiaux est claire !
Je pensais l’avoir cerné après tant de temps passé ensemble.
Mais…
‘Les humains sont bien des êtres qui révèlent un visage nouveau à chaque fois.’
— Rassemble les exécuteurs martiaux et les anciens de la faction ! À partir d’aujourd’hui, sauf toi, je chasse tous les médiocres ! Si ces crapules de cultivateurs vont semer le tumulte, pas de loisir pour enseigner paisiblement.
Il réunit aussitôt tous les disciples de la faction et renvoya tous ceux du deuxième rang et au-dessous.
Il renvoya même ceux du premier rang qui n’avaient pas encore maîtrisé l’énergie de sabre/épée.
Ainsi, il ne resta qu’environ 310 personnes au Palais de l’Extrême Martialité : cinq anciens au Trois Fleurs, trois cent trois disciples du premier rang et plus, et moi, vice-chef au fin de deuxième rang.
Dès ce jour, hyung-nim enseigna le Traité aux anciens ayant atteint les Trois Fleurs Rassemblées au Sommet.
Il enseigna aussi aux disciples du premier rang les principes du Traité — formations de sabre/épée et tactiques combinées — pour tenir tête aux cultivateurs.
Et moi…
— Tu dois te concentrer pour atteindre au plus vite le premier rang. Pour passer du fin de deuxième au premier rang, l’essentiel est d’incarner complètement ton art dans ton corps.
Chaque jour fut un entraînement infernal.
Jusqu’à ce que l’Épée Tranche-Montagne se fonde entièrement en moi !
Après avoir rossé et chassé les cultivateurs, notre bâtiment — pourtant autorisé par le gouvernement — fut déclaré construction illégale, et nous dûmes partir.
De plus, nous reçûmes un ordre de dissolution totale de la faction.
Mais…
— Ignorez, répondit simplement hyung-nim, poursuivant l’instruction des anciens, des disciples… et la mienne.
Un mois passa à braver l’ordre du gouvernement.
Nous découvrîmes dans les rues des avis de recherche à l’effigie de hyung-nim et de moi.
Le gouvernement avait mis notre tête à prix, nous traitant de traîtres.
— On s’en va, répondit encore hyung-nim, laconique, emmenant cinq anciens et trois cents disciples, errant dans la brousse.
Des chasseurs de primes attirés par la récompense nous attaquèrent, mais ils furent neutralisés par les disciples du premier rang avant même d’approcher hyung-nim.
Quand le nombre de chasseurs abattus avoisina la centaine, les grandes factions du monde martial publièrent une déclaration conjointe nous déclarant ennemis publics.
Notre Palais de l’Extrême Martialité fut rebaptisé Palais des Démons, et Young-hoon hyung-nim reçut le surnom de Démon Extrême.
Notre prime monta encore, et des factions petites et moyennes de tout le pays unirent leurs forces pour nous attaquer.
Ainsi passèrent dix ans.
Dix ans que nous étions l’ennemi du monde martial.
Et vingt ans depuis ma régression.
Le titre de hyung-nim évolua de Démon Extrême à Démon Céleste Extrême.
Dans le monde martial, on ne parlait plus de Palais des Démons, mais de Palais des Démons Célestes.
En dix ans, beaucoup des 300 disciples, aguerris par d’innombrables combats réels, avaient atteint le pinacle.
C’était dû à leur expérience et à la pratique continue des principes du Traité — formations et tactiques unies.
Ceux qui n’avaient pas atteint le Royaume du Pinacle étaient au faîte du premier rang, et on les appelait les forces directes du Palais des Démons Célestes : leur renommée grandissait.
Pendant ce temps, le Palais des Démons Célestes étant resté invaincu dix ans durant, diverses sectes hétérodoxes et groupes démoniaques, et parfois quelques factions « justes » admirant le Démon Céleste Extrême Young-hoon, nous rejoignirent.
Le Palais des Démons Célestes avait énormément grandi par rapport à dix ans plus tôt.
À vrai dire, en dehors des — 310 officiels du Palais, le reste n’était que des fidèles attirés par notre aura.
De l’extérieur, le Palais ressemblait désormais à une faction religieuse, une vaste puissance emplie de fervents du Démon Céleste Extrême.
Tout avait changé à une échelle prodigieuse depuis dix ans.
Les seules choses inchangées étaient…
Hyung-nim Young-hoon, et moi.
— Comment peux-tu être encore à peine accroché au premier rang après dix ans d’expérience réelle, de développement d’énergie interne et de pratique continue ?
— Oui. Hyung-nim doit être content que tu aies amélioré le Traité au point de le faire évoluer.
Je manquais toujours de talent.
Et lui en débordait toujours.
Je grognai et poursuivis ma pratique du sabre.
Dix ans.
Après dix ans d’efforts, j’avais tout juste réussi à obtenir la liberté dans mon art et à poser un pied au début de premier rang.
Mais…
— Comment le vice-chef du Palais des Démons Célestes peut-il encore ne pas projeter l’énergie de sabre ? Tu sais quel est ton surnom ?
— Quel est mon surnom ?
— Tu n’en as pas ! Comme tu es à peine au début de premier rang et que tu ne sers à rien dans les grandes batailles, personne ne fait attention à toi — d’où l’absence de surnom !
— Mais je ne suis pas un combattant de première ligne, qu’attends-tu de moi !
C’est vrai.
Je n’avais pas participé aux batailles depuis dix ans, faute de talent. À la place, j’avais appris le déguisement, l’infiltration, l’instigation, les pièges mécaniques et l’espionnage pour aider le Palais.
Ce n’est pas que je refusais de progresser.
— J’ai beau m’entraîner, je n’avance pas.
Ceux au fin de premier rang étaient aux portes du pinacle depuis dix ans.
Ceux au milieu de premier rang affûtaient leur tranchant pour l’atteindre depuis dix ans.
J’étais le seul à m’être hissé tant bien que mal du fin de deuxième au début de premier.
Bien sûr, être premier rang équivaut, ailleurs, au rang d’ancien d’une grande faction ou de chef d’une petite : c’est respectable.
Si j’avais rejoint une grande secte, un fauteuil d’ancien m’attendait.
Mais au Palais des Démons Célestes, où l’on connaissait les principes du Traité et où l’on recevait depuis dix ans l’enseignement du meilleur artiste du monde, de nombreux disciples tutoyaient le pinacle.
Or, la différence entre pinacle et premier rang est un ciel et terre.
Un premier rang ne bat jamais un maître du pinacle.
La seule manière est d’aligner plus de 50 premiers rangs en essaim pour épuiser sa force physique et mentale.
Dans ce Palais où beaucoup frôlaient le pinacle, j’étais traité comme le maillon faible.
Cependant…
— Pourquoi n’es-tu que le seul à te plaindre de moi, hyung-nim ? Même les anciens formés par toi reconnaissent mes contributions.
Connaissant ma faiblesse, je m’efforçais d’être utile autrement.
Fort de mon expérience passée de stratège en chef de l’Alliance du Wulin, je récoltais du renseignement, m’infiltrais, me déguisais, ramenais des informations cruciales.
— Hyung-nim, il n’y a que toi qui sois trop dur avec moi.
— Qui est dur ? Ça fait dix ans que je te guide, et tu es toujours à peine au premier rang — c’est frustrant !
— Non mais, premier rang, c’est le nom du chien de quelqu’un ? Les gens ordinaires deviennent premier rang à mon âge !
Bien sûr, par rapport aux « ordinaires », j’étais pire.
Si je compte toutes mes vies, j’avais largement plus de cent ans.
Après un siècle de pratique, n’être qu’au début de premier rang, c’était un talent martial misérable.
Seule ma régression en avait masqué l’ampleur.
— Entre les infos que tu as apportées et ça…
Il se frotta le crâne, comme s’il avait mal.
Ce soir-là, hyung-nim et les anciens se réunirent à son appel.
— Dernièrement, il y a des mouvements suspects. On dirait que le gouvernement et le monde martial collaborent pour nous attaquer.
À ces mots, les visages des anciens tressaillirent.
— Ces bons à rien, pour qui se prennent-ils ?
— Nous avons six monstres qui ont maîtrisé le Traité, ici !
— Cela ressemble à un souci superflu pour le Démon Céleste Extrême.
Alors, hyung-nim tourna les yeux vers moi et me fit signe.
J’étalai les documents amassés par espionnage et exposai la situation.
— Ce n’est pas simple. Récemment, derrière le gouvernement et le monde martial, le clan des cultivateurs — qui complote — compte intervenir en personne, parce que nous leur échappions depuis plus de dix ans.
— Des cultivateurs…
— Si l’info vient du vice-chef…
— Le vice-chef excelle en tout sauf en arts martiaux, on peut le croire…
— C’était un compliment ou une insulte ?
Je toussai et expliquai comment j’avais obtenu l’information et ce qui nous attendait.
— Il est probable que le gouvernement et le monde martial nous poussent vers l’endroit où se trouve le clan des cultivateurs.
— Que comptes-tu faire ?
Je souris et exposai la stratégie.
— Avant de tomber entre leurs mains, frappons-les en premier.
— Attaquer les cultivateurs ?
— Oui. Ce sont des cultivateurs, mais ils sont actuellement dispersés à travers le pays, en train de tramer. Si nous les abattons séparément, leurs plans seront vains.
Un ancien me posa une question.
— As-tu localisé ces cultivateurs à l’œuvre ?
— Je suis confiant de connaître l’emplacement de plus de 90 % d’entre eux.
— Comme attendu du vice-chef. Des renseignements fiables.
En réalité, c’étaient des informations que j’avais arrachées dans ma vie passée de stratège en chef de l’Alliance — impossibles à obtenir dans la situation actuelle, puisqu’on était l’ennemi du monde martial.
— Nous prévoyons de traquer les cultivateurs et de combattre ; tout le monde doit donc progresser. Surtout le vice-chef. Je prends la responsabilité de te hisser au-dessus du bas de l’échelle du Palais des Démons Célestes.
Hyung-nim me tapa l’épaule en riant de bon cœur.
— Ha ha. J’ai vu le vice-chef se faire gronder par le chef ce matin à l’entraînement. Tu t’entraînes depuis tout à l’heure !
— Tu es vraiment assidu, ha ha ha !
— Évidemment, il ne convient pas que le vice-chef du Palais des Démons Célestes soit plus faible que les derniers de la troupe.
Les anciens éclatèrent aussi de rire, en me taquinant.
Et quelques jours plus tard…
Nous partîmes abattre un par un les cultivateurs dispersés à travers le Yanguo.
