Auteur : Entrail_Jl
Traductrice : Moonkissed
Le campus était grand. Il m’a fallu environ cinq minutes pour me rendre du dortoir au bâtiment principal.
[Hall Dorset]
C’était là que nous étions censés être.
C’était l’un des sept halls de l’institut et c’est là que les cadets de première année suivaient leurs cours.
« … Dans quelle classe sommes-nous ? »
Le hall était grand.
C’était un grand bâtiment avec un chemin bordé de fleurs et d’arbres colorés qui menait à l’entrée, où une rangée de statues se dressait en formation solennelle.
Il débordait d’étudiants.
Le plus gênant était le regard dans lequel ils me regardaient. Certains m’évitaient, tandis que d’autres semblaient ouvertement hostiles.
Cela ne me dérangeait pas.
C’était le résultat de mes actions le premier jour.
« Notre classe devrait être là. »
Leon désigna une certaine porte. À première vue, elle ne semblait pas si impressionnante que ça.
Mais…
« Pourquoi personne ne s’y rend ? »
Contrairement aux autres salles de classe, qui étaient ouvertes et remplies de cadets de passage, celle-ci semblait plutôt isolée. Comme si les gens l’évitaient.
« … N’as-tu pas lu le manuel ? »
« Manuel… ? Ah. »
Je sortis un petit dépliant de ma poche. Je me souviens l’avoir reçu hier, mais comme je me concentrais sur ma formation, je l’avais complètement oublié.
« Ça ? »
« Ouais. »
Je parcourus le contenu.
En bref.
« Nous sommes en retard. »
« … C’est vrai. »
« Et tu ne m’as rien dit ? »
« Je pensais que tu étais au courant. »
« … »
Il y avait des moments où j’avais vraiment envie d’étrangler ce type.
S’il n’avait pas été là pour m’aider et s’il n’avait pas été plus fort, je l’aurais déjà fait.
Cela dit,
‘Je me demande quel est son but final…’
Je ne savais toujours pas pourquoi il m’aidait. Il a dit que ça lui était bénéfique.
Comment ça ?
‘Comme prévu, je ne peux toujours pas lui faire confiance.’
Il en était de même pour lui envers moi.
D’une certaine manière, nous n’étions pas si différents.
Fixant la porte de la salle de classe, je soupirai.
Je me sentais étrangement nerveux. Ce n’était pas tant parce que j’avais peur que les gens me défient. Cela ne me dérangeait pas. Ce qui me rendait nerveux, c’était mes capacités.
Elles n’étaient pas à la hauteur à ce moment-là.
J’étais probablement le cadet le plus faible présent.
« Huu. »
Après avoir repris mon souffle en secret, je m’approchai lentement et prudemment de la porte.
Crac.
L’intérieur était épuré ; de longs bureaux en bois s’alignaient sur les côtés, en cascade. Ils étaient tous remplis à ras bord, avec à peine quelques espaces vides.
Immédiatement, tous les regards se tournèrent vers moi.
Ils étaient pesants. Mais le plus pesant de tous était celui de la femme en face de moi.
Probablement notre instructrice.
« Cadets ».
Ses yeux bleus cristallins passaient de Leon à moi. Elle avait les cheveux bruns courts et semblait avoir la quarantaine.
Alternant son regard entre nous deux, elle ouvrit enfin la bouche pour dire :
« … Vous êtes en retard ».
J’étais déjà au courant.
Les choses auraient été plus faciles si je m’étais simplement excusé, mais je me souvins de la description que Leon avait faite du précédent Julien et répondis sèchement :
« Il semblerait que ce soit le cas. »
« Il semblerait que ce soit le cas… ? »
Ma réponse la laissa exaspérée et elle fit une grimace. Je me sentis un peu désolé pour elle, mais je ne le montrai pas et gardai mon visage stoïque.
Elle ouvrit la bouche, mais la referma aussitôt.
« Vas-y. Assieds-toi. »
« … Merci. »
C’est ce que je fis.
Trouvant la place la plus proche, je m’assis et pris une grande respiration.
C’était plus facile que je ne le pensais.
Elle était probablement une enseignante indulgente. Du moins, c’est ce que je pensais.
« Tu es en retard ! Sors de ma classe ! »
Fixant l’élève qui venait d’entrer dans la classe et qui venait d’être expulsé, j’ouvris la bouche pour dire quelque chose quand je réalisai que je ne pouvais rien dire.
Pourquoi… ?
Je regardai à ma gauche, où Leon était assis. Il me regarda puis haussa les épaules.
« Probablement notre apparence. »
Oh.
Le cours reprit.
« Pour continuer là où j’en étais… Comme vous le savez tous, la magie est subdivisée en trois catégories différentes. [Esprit], [Élémentaire] et [Corps]. »
La classe tomba dans le silence.
La voix de l’instructeur résonna doucement dans la classe.
« Chaque catégorie est divisée en sous-catégories. Prenons la classification [Esprit] par exemple. Avec [Émotif], [Télékinésie], [Esprit] et [Télépathie], elle contient un total de quatre sous-catégories. Ou comme certains aiment à le dire, de « voies » ».
Je tendis l’oreille pour écouter attentivement le cours. Toutes les informations étaient vitales. Je devais prêter une attention particulière à tout ce qui était dit.
« … Comme on le sait, tout le monde peut pratiquer la magie. Si vous pouvez manipuler le mana, vous avez les qualifications pour devenir magicien ou chevalier. Bien sûr, ce n’est pas un problème pour vous tous ici présents. »
Elle sembla regarder certains élèves ; son regard finit par se poser sur moi.
« Le talent n’est qu’un facteur qui indique le rythme de votre progression. Il ne vous limite pas dans la pratique d’autres voies. »
Je notai cette information dans mon esprit.
Mes talents se situent actuellement dans les sous-catégories [Malédiction] et [Émotif].
S’il m’était possible de pratiquer des choses en dehors de ces deux catégories, alors cela valait la peine d’être envisagé pour l’avenir.
« Maintenant, c’est le moment de poser une question. »
La conférencière regarda autour de la classe. Je sentis son regard s’attarder brièvement dans ma direction.
Quel genre de… ?
Elle sourit.
« De toutes les catégories, laquelle considérez-vous comme la plus faible ? »
La plus faible ?
Des murmures remplirent la classe tandis que les élèves discutaient entre eux.
Finalement, l’un des cadets leva la main. Il se démarquait immédiatement par sa grande taille, ses cheveux blonds et ses yeux bleus.
Le fait que son apparence ait attiré l’attention de nombreuses personnes présentes m’a tout de suite dit tout ce que j’avais besoin de savoir sur lui.
Il était fort.
Probablement parmi les cadets les mieux classés.
« Oui ? Cadet Anders. »
Oh ?
Je sentis soudain son regard.
Alors que sa bouche s’ouvrait, il répondit lentement. Comme s’il voulait que j’entende sa réponse.
« … Émotif. »
Une provocation claire.
Plusieurs yeux se posèrent sur moi.
« Émotif ? »
Le regard de l’instructrice se posa sur moi pendant un moment. Elle semblait avoir été influencée par les autres membres de la classe.
« Qu’est-ce qui te fait penser que c’est le cas ? »
« C’est la catégorie la plus longue à apprendre. De plus, vous devez pouvoir toucher votre adversaire pour influencer ses émotions. S’il ne peut pas vous toucher, il est inutile. »
« Ce n’est pas le cas. »
En secouant la tête, l’instructrice corrigea :
« C’est simplement parce qu’ils sont au premier niveau de maîtrise. À un stade supérieur, ils peuvent influencer quelqu’un avec de simples mots. Plus loin sur le chemin, ils peuvent lire les émotions. »
J’écoutai attentivement ses paroles.
La sous-catégorie [Émotif] était encore une énigme pour moi. Contrairement à ma sous-catégorie [Malédiction], je ne pouvais pas la pratiquer par l’entraînement à la répétition.
La seule façon pour moi de progresser dans la voie [Émotive] était de comprendre les émotions. Plus je comprenais, plus je m’améliorais.
Mais c’était plus facile à dire qu’à faire.
‘Maintenant que j’y pense… Elle a mentionné quelque chose à propos de la maîtrise de premier niveau.’
Je me suis souvenu des notifications que je recevais presque quotidiennement.
La seule concernant [Peur] et Exp.
‘… Donc si je l’améliore, je pourrai influencer les gens avec des mots ?’
Cette pensée m’excitait pour une raison quelconque.
Y avait-il autre chose ?
Le cadet poursuivit :
« C’est effectivement vrai, mais il est également vrai que ce n’est pas facile à réaliser. Il faut parfois de nombreuses années pour atteindre un niveau où l’on peut influencer les émotions d’autrui. Pour pouvoir les influencer par les mots ? »
Il ricana.
« … Il faudra que tu sois aussi vieux que mon père pour pouvoir y arriver. »
« Ce n’est pas forcément vrai. »
L’instructrice secoua la tête.
« Il existe de nombreux cas où les gens atteignent un tel état à un jeune âge. Gardez à l’esprit qu’il existe des états supérieurs. Être capable d’influencer quelqu’un par les mots est encore considéré comme un niveau d’entrée. »
Niveau d’entrée… ?
Influencer par les mots était juste un niveau d’entrée ?
Je repensai à mes pouvoirs. Depuis l’examen, je n’avais pratiquement pas touché à l’autre domaine.
Ce n’était pas parce que je n’aimais pas ça.
C’était tout le contraire.
En réalité, je n’étais pas sûr d’être capable de le gérer. Les séquelles de la dernière fois m’avaient laissé une cicatrice dans l’esprit.
Comme un blocage mental, cela m’avait poussé à l’éviter.
Je n’étais tout simplement pas prêt.
Mais…
‘Vous voulez dire que je n’ai fait qu’effleurer la surface de ce qui est possible ?’
« Cadet Julien. »
Sentant le regard de l’instructrice, je me tournai vers elle.
« … En tant que mage émotif, que penses-tu de la réponse du cadet Anders ? »
Qu’est-ce que j’en pensais ?
Il avait raison.
Tous ses mots avaient un sens. D’après ce que j’avais vécu, il avait raison sur tous les plans.
Le domaine [émotif] était un chemin qui prendrait probablement des siècles à maîtriser.
Il englobait toutes les expériences de la vie et les transformait en émotions. À moins de vivre constamment toutes ces émotions, on ne pouvait pas s’améliorer.
À cet égard, c’était le plus faible de tous les autres chemins.
Mais…
Je tournai légèrement le poignet.
Mes yeux tombèrent sur le tatouage du trèfle.
Était-ce la même chose pour moi ?
« … »
La classe se tut.
Ils attendaient tous ma réponse. « Qu’est-ce qu’il va dire ? », « Comment va-t-il répondre ? »
Leurs visages disaient tous la même chose.
Et je me retournai pour faire face au cadet.
Anders, c’était ça ?
Je sentis le coin de mes lèvres se soulever légèrement.
« … C’est des conneries. »
Une réponse sortit de ma bouche.
« Le plus faible ? Ça n’existe pas. »
Je ne racontais pas n’importe quoi sur le moment.
C’était ce que je pensais vraiment.
« Il n’y a que des personnes faibles. Pas de voie faible. »
Ce n’était pas parce que le domaine Émotif était le plus difficile à maîtriser qu’il s’agissait de la classe la plus faible.
Dès le départ, la question était mauvaise.
« Tu dis qu’il faut beaucoup de temps à un mage Émotif pour devenir fort. Sur quoi te bases-tu pour dire ça ? »
« Quel fondement ? »
Le cadet me regarda comme si j’étais stupide.
« C’est du bon sens. Regarde tous les mages les plus puissants du monde. Notre Empire compte sept monarques. Combien d’entre eux sont du domaine Émotif ? Aucun ! »
Il pointa son doigt vers moi.
Tout à coup, il commença à parler d’autre chose.
Probablement ce qu’il voulait dire depuis le début.
« … Penses-tu que personne ne le voit ? Ton flux de mana est faible. Tu ne sembles même pas capable de contrôler correctement ton mana. Pour l’amour de Dieu, je ne sais pas pourquoi tu es classé premier. »
Ses paroles semblaient faire écho aux pensées de nombreuses personnes présentes dans la salle de classe, dont beaucoup acquiesçaient.
J’ai pris la parole.
« Je pense que c’est à cause de tes réalisations dans le domaine de l’émotivité. Même dans ce cas, je doute que tu puisses me faire quoi que ce soit. »
Quand il a finalement dit ce qu’il voulait dire, avec un regard méprisant, il a ajouté :
« En bref, tu n’es pas fait pour ce rôle. Tu es faible. »
Une fois de plus, la salle est tombée dans le silence.
Tous les yeux étaient rivés sur moi.
« Haaa… »
Toute l’attention étant tournée vers moi, je penchai la tête en arrière et fermai les yeux.
‘… Alors ils l’ont remarqué.’
Ce n’était pas comme si je ne m’y attendais pas.
Tout le monde avait dû le remarquer dès le premier jour. Le fait que j’étais faible. Que je n’étais pas au même niveau qu’eux.
Je le comprenais encore plus clairement qu’eux.
C’était pour cette raison que je provoquais tout le monde.
Entraîné jusqu’à la folie.
Ses paroles avaient du sens, et il n’y avait rien de mal à cela.
Pourtant,
« Tu as tort. »
Mes yeux étaient toujours fermés, donc je ne pouvais pas voir.
Tout ce que je voyais, c’était l’obscurité.
Dans cette obscurité, je sentais ma main se déplacer vers mon avant-bras. Là où reposait le trèfle à quatre feuilles.
J’ai hésité un peu au début, mais ensuite, je me suis rappelé mon objectif.
C’est là que mon esprit s’est affermi.
Exact.
Pour atteindre mon objectif, je dois utiliser pleinement tous les avantages dont je dispose.
Par conséquent…
Mon doigt s’est enfoncé dans mon avant-bras.
‘… Personne d’autre que moi ne peut être l’Étoile noire.’