Lin Ming, seize ans, ouverture de la Condensation de l’Impulsion !
Comment avait-il vaincu Mugu Buyu ? Et à en croire Mugu Buyu lui-même, non seulement il n’était pas au niveau, mais il était très loin de pouvoir rivaliser avec lui.
Quel intérêt aurait-il à mentir à ce sujet ? Un aussi grand talent ne se risquerait pas à frustrer son esprit en se dénigrant volontairement. Sans compter que ça ne servait à rien, l’Île du Phénix Divin ne pouvant pas se baser sur quelques mots de Mugu Buyu pour décider de placer Lin Ming au rang céleste.
Il ne restait par conséquent qu’une seule explication, et celle-ci voulait que Lin Ming soit un véritable monstre !
Lin Ping de la Montagne du Paon laissa échapper un soupir en regardant Mugu Buyu. Il n’aurait probablement aucune difficulté à le vaincre en l’écrasant de toute sa force. En revanche, comment Lin Ming y était-il parvenu alors qu’il se trouvait seulement à l’ouverture de la Condensation de l’Impulsion ?
Qu’adviendrait-il une fois qu’il atteindrait le sommet de la Condensation de l’Impulsion s’il était déjà aussi puissant ? Et s’il entrait dans le Houtian ?
Quand ce jour arrivera , j’ai bien peur que je ne sois même plus capable de le toucher …
Pas étonnant qu’il ait été sélectionné comme talent de rang céleste . Il est déjà si fort pour son âge … En fin de compte , c’est sans doute légitime qu’il soit le seul talent de rang céleste .
Personne n’était en mesure de défier lin Ming du fait de son jeune âge. Quand bien même, les velléités au défi s’étaient clairement dissipées après la rouste que Mugu Buyu avait infligée à Zhang Shaoshan. Après tout, de tous les disciples présents, seul Lin Ping aurait été en mesure de rivaliser avec lui ; les autres étant au mieux d’un niveau similaire à celui de Jiang Baoyun.
À ce moment-là, Jiang Baoyun se tourna vers le jeune homme aux sourcils courbés et lui dit : « Prenons pied dans l’arène, condisciple aîné. »
D’abord surpris, l’intéressé ressentit aussitôt une vague d’amertume s’emparer de lui. Que lui était-il passé par la tête ? Leur match était effectivement censé avoir lieu juste après celui de Mugu Buyu et Zhang Shaoshan.
La bouche sèche et le souffle court, il déglutit nerveusement. Quelle poisse !
Déjà qu’il n’aurait pas fait le poids contre cette momie… Et à en juger par les informations dont il disposait, Jiang Baoyun était encore plus féroce !
S’il ne manquait pas de confiance en ses propres capacités, il n’était pas prétentieux au point d’imaginer pouvoir rivaliser avec de tels personnages. Descendre dans l’arène ne signifiait ni plus ni moins que courir à sa perte.
Il n’en restait pas moins le troisième disciple de la secte du Nuage Tombant, l’une des six plus grandes sectes de grade trois. Comment pouvait-il envisager de se débiner face à un disciple des Sept Profondes Vallées ?
Cela n’empêche qu’y aller revenait à prendre le risque de se faire massacrer, et probablement d’une manière si humiliante que l’honneur de sa famille en pâtirait.
D’un autre côté, s’il se rétractait ici, il pouvait être sûr qu’on lui reprocherait sa couardise ; ce qui était sans doute encore plus honteux.
Le jeune homme saisit alors pleinement ce que signifiait ‟chevaucher le tigre.” Il n’était plus question pour lui d’en redescendre. Pire encore, cette catastrophe lui tombait dessus uniquement par sa faute.
Alors que sa réponse se faisait attendre et qu’il semblait face à un dilemme insurmontable, une voix résonna froidement : « Je combattrais à ta place, condisciple Song. »
Le jeune aux sourcils arcboutés se retourna immédiatement et vit Bai Shuxuan juste derrière lui. Quoique d’une beauté ordinaire, la jeune femme respirait la douceur et la tranquillité, à la manière paisible de l’eau à la surface d’un lac. On ne pouvait pas avoir autre chose qu’une impression favorable en la regardant.
Le cœur du jeune homme aux sourcils arcboutés s’emballa de joie. Son visage était plein de gratitude pour celle qui venait de se porter à son secours. Bai Shuxuan était le disciple en chef de la secte du Nuage Tombant, un peu au même titre que Jiang Baoyun des Sept Profondes Vallées. C’était assurément un grand génie de sa génération, et sa réputation n’avait rien à envier à celle de Lin Ping.
Bai Shuxuan du Nuage Tombant et Lin Ping de la Montagne du Paon étaient d’ailleurs connus en tant que ‟le dragon et le phénix” des dix-neuf sectes de grade trois. Lin Ping était âgé d’un an de plus, et avait déjà atteint le Houtian. Bai Shuxuan avait quant à elle préféré rester à la Condensation de l’Impulsion, même si elle était capable d’y avancer à n’importe quel moment ; elle attendait simplement que sa véritable énergie déborde d’elle-même.
Il fallait une sacrée confiance en ses capacités pour progresser de la première étape de la Transformation du Corps jusqu’au Houtian en attendant à chaque fois que sa véritable énergie déborde naturellement. Quelqu’un qui manquerait de talent mourrait bien avant de réaliser le moindre progrès significatif.
Si Jiang Baoyun n’avait encore jamais défié Bai Shuxuan, il comptait bien le faire un jour ou l’autre. Et voilà que, porté par un concours de circonstances, ce match se présentait de lui-même.
« Condisciple aîné Bai, on ne tarit pas d’éloges à votre sujet. Enseignez-moi ! » Jiang Baoyun la salua en tenant son épée avec déférence. Il avait beaucoup d’admiration pour Bai Shuxuan.
Cette bataille de maîtres monopolisa immédiatement l’attention. L’Aîné du Nuage Tombant s’empressa de regagner son fauteuil. Bai Shuxuan était leur disciple en chef. Une défaite face à Jiang Baoyun les placerait vraiment dans l’embarras. Du haut de ses mille cinq cents ans d’histoire, la secte du Nuage Tombant restait l’une des plus grandes sectes de grade trois de cette région du monde. Leur héritage dépassait de loin celui des Sept Profondes Vallées.
Jiang Baoyun dégaina ses deux épées dès le début du match, avant d’invoquer son avatar dans la foulée. Il n’était pas question de prendre le moindre risque face à un adversaire du calibre de Bai Shuxuan.
Les deux adversaires commencèrent à échanger quelques coups pour se jauger, mais un instant plus tard, leurs mouvements atteignaient déjà une vitesse extrême, tandis que la lumière d’épée inondait l’arène.
Bai Shuxuan était tout aussi rapide que Jiang Baoyun, alors même que le bretteur des Sept Profondes Vallées maîtrisait son propre pas d’épée. Si ce n’était pas le cas de Bai Shuxuan, son corps semblait avoir fusionné dans l’ombre de son épée, lui permettant de se déplacer aux quatre coins de l’arène avec une vélocité déconcertante.
Quelle férocité ! Les yeux de Lin Ming s’illuminèrent. Si on devait lui trouver une faiblesse, ce serait sans aucun doute de se retrouver face à quelqu’un d’encore plus rapide que lui. Dans ce cas de figure, son temps de réaction pouvait devenir un véritable point faible. Il n’était pas capable de riposter contre des attaques au corps-à-corps quasi instantanées. La seule riposte qu’il avait trouvée consistait à placer l’aiguille du serpent dragon dans sa poitrine pour la libérer au dernier moment afin de repousser l’assaut de son adversaire.
Aussi ingénieuse qu’elle soit, cette méthode ne correspondait pas à la véritable destination de ses capacités.
Ma vitesse est ma plus grande faiblesse ! Qui aurait cru que je ne serais toujours pas assez rapide après avoir compris le Concept de Vent … Roc Doré Déchirant le Vide est peut-être une des meilleures techniques de déplacement qui soient , elle ne se destine pas à des débutants comme moi . Les concepts qui sous-tendent son fonctionnement sont d’une profondeur et d’une complexité sans commune mesure avec les autres techniques que j’ai rencontrées jusqu’ici . À mon échelle , je n’ai fait que caresser une infime fraction de ce tout , une simple goutte dans l’océan … Il faut dire que Roc Doré Déchirant le Vide se base en réalité sur deux concepts différents , celui de vent et celui d’espace ; et si j’ai pu commencer à rassembler les connaissances les plus basiques du premier , je ne sais absolument rien du second . D’où mes piètres résultats avec la technique en elle-même . Il va vraiment falloir que je me débrouille pour pallier ce problème de vitesse au plus vite !
Dans l’arène, la lumière d’épée formait comme un réseau d’étincelles éblouissantes entre les ombres résiduelles laissées derrière eux par les deux combattants. Le public avait beau être composé des plus grands génies des différentes sectes, les plus faibles d’entre eux ne parvenaient pas à suivre parfaitement les mouvements de Bai Shuxuan et Jiang Baoyun.
« Lame Perçant les Cieux ! »
L’aura de Jiang Baoyun s’éleva dans le ciel, tout le potentiel de son épée jaillissant d’un seul coup.
Il se décidait finalement à utiliser la technique secrète ultime de la Faction des Epéistes avec l’aide de son avatar.
Lors de son combat contre Lin Ming, Jiang Baoyun avait utilisé cette technique pour porter le coup final. Il était même parvenu à faire jeu égal avec lui en termes de force brute, ce qui témoignait de la puissance de cette technique.
D’autant plus que la lame de cristal noir de Jiang Baoyun contenait une attaque psychique. L’Esprit d’Épée y était utilisé comme une arme à part entière et possédait une redoutable intention meurtrière. Comment Bai Shuxuan pourrait-elle bloquer ça ?
La jeune femme réalisa immédiatement le potentiel meurtrier de ce coup d’épée. Une lumière blanche enveloppa alors son corps, et une série d’anneaux d’eau se formèrent autour d’elle.
« Voile d’Eau du Lotus ! »
En l’espace d’un instant, Bai Shuxuan fut entourée par une pure énergie d’eau.
« Mm ? Concept de l’eau ? »
Son degré de compréhension du concept de l’eau était visiblement nettement plus profond et avancé que celui du concept de vent de Jiang Lanjian.
Chacun de ces talents possédait ses propres atouts.
Le Voile d’Eau du Lotus fut dispersé dans une pluie de fines gouttelettes, mais l’assaut de Jiang Baoyun avait lui aussi été bloqué. Lin Ming découvrit avec étonnement que le voile d’eau formait une barrière naturelle contre les attaques psychiques.
Les deux combattants reculèrent d’une vingtaine de mètres, leurs visages pâles. De toute évidence, ils étaient légèrement blessés, et ces blessures risquaient d’affecter leur âme.
Une blessure d’âme n’était pas à prendre à la légère, le moindre petit dommage psychique pouvant nécessiter une longue convalescence avant de se résorber. Il fallait être particulièrement prudent, car une fois dépourvue de la protection de sa mer spirituelle, l’âme était aussi fragile qu’un nourrisson prisonnier au cœur une tempête de neige.
« Assez ! Ce match est terminé. Vous êtes à égalité ! » déclara d’un seul coup Mu Qianyu depuis le siège d’honneur. Une fluctuation de véritable énergie à la fois étrange et harmonieuse suivit sa voix. On aurait dit la caresse apaisante d’une douce brise de printemps.
Dans l’arène, Bai Shuxuan et Jiang Baoyun furent entourés par cette fluctuation de véritable énergie. Une sensation agréable de chaleur pareille à celle qui se dégage du poêle en plein cœur de l’hiver les envahit aussitôt. Leurs âmes frissonnantes débordèrent tout à coup de vitalité.
Les deux jeunes gens furent stupéfaits. Ils savaient que Mu Qianyu était une artiste martiale d’attribut feu, mais ils étaient persuadés que l’énergie de feu pouvait uniquement être utilisée à des fins offensives. Pourtant, Mu Qianyu venait d’y recourir pour soigner leurs blessures. Sa compréhension des lois du feu atteignait manifestement un degré insondable.
Quel soulagement ! Le front de l’Aîné de la secte du Nuage Tombant dégoulinait de sueur. L’échange qui venait d’avoir lieu montrait bien que Jiang Baoyun rivalisait avec Bai Shuxuan. Jusque-là pas de quoi s’inquiéter. Cependant, alors que le combat avançait, il découvrit avec horreur que l’épée de cristal noir de Jiang Baoyun contenait une attaque psychique. Et à en juger par les fluctuations d’énergie, il ne semblait pas la maîtriser convenablement. Si Bai Shuxuan avait été blessée lors de cette rencontre, elle n’aurait sans doute jamais pu aller plus loin sur la voie de l’épée.
Aucune blessure n’était plus difficile à traiter et guérir qu’une blessure d’âme. D’autant plus que la perception constituait l’un des aspects les plus importants pour ceux qui poursuivaient la voie de l’épée. À vrai dire, un bretteur avec une mer spirituelle endommagée était un bretteur mort…
Bai Shuxuan était le plus grand trésor du Nuage Tombant. Si son avenir avait été anéanti par une blessure d’âme incurable à cause d’un petit concours d’arts martiaux, l’Aîné n’aurait pas eu assez de larmes pour pleurer toute sa tristesse.
Shi Zongtian laissa lui aussi échapper un soupir de soulagement. Ces deux jeunes disciples étaient de force équivalente. À ce détail près que Jiang Baoyun était plus jeune de plusieurs mois. Son talent pouvait donc être considéré comme supérieur.
Ces deux matchs emportèrent toutes velléités de contestation, aucun disciple n’osant plus objecter quoi que ce soit à propos des listes de l’Île du Phénix Divin. Les disciples de la jeune génération des Sept Profondes Vallées étaient tout simplement des brutes. Ça commençait avec ce type inconnu qui ressemblait à une momie desséchée et répondait au nom de Mugu Buyu ; il n’avait fait qu’une bouchée de Zhang Shaoshan. Venait ensuite Jiang Baoyun qui rivalisait sans peine avec le plus grand talent de la secte du Nuage Tombant ! Et pour finir, il y avait Lin Ming, un monstre à la force plus redoutable encore que celle des deux autres.
Un talent pareil pour un garçon de seize ans… plus personne n’osa remettre en cause sa présence au rang céleste.
Quant aux trente disciples qui se trouvaient entre le rang humain et le rang terrestre, ils s’étaient plus ou moins tous fait à l’idée qu’ils devraient s’élancer à travers les étages de la Pagode Eclatante des Sept Trésors pour décider qui d’entre eux accéderaient au rang céleste, et qui seraient relégués au rang humain.
Bien entendu, rien de tout cela ne concernait Lin Ming.
« S’il n’y a pas d’autres objections, cette réunion est terminée. Que chacun retourne d’où il vient, déclara Mu Qianyu en se levant, avant de faire signe à Lin Ming et de lui dire : — pas toi.
— Bien, Votre Altesse. »
Devant une foule aussi hétéroclite, Lin Ming se devait de maintenir une attitude des plus respectueuses. Mais pourquoi Mu Qianyu lui demandait-elle de rester ?
Cette demande expresse de Mu Qianyu de rester alors qu’ils étaient tous priés de s’en aller attira immédiatement l’attention de tous les autres disciples. Nul besoin d’être un génie pour comprendre qu’il bénéficiait d’un traitement de faveur… Mais que pouvaient-ils bien y faire sinon envier sa position ?
Les choses étaient ainsi faites !
Impossible ! Zhang Shaoshan venait de se réveiller après qu’on lui ait administré des pilules. Toutefois, la vision de Lin Ming restant seul sur la place tandis que tous les autres disciples s’en allaient lui fut si insupportable qu’il manqua de peu de s’évanouir.