Lin Ming sourit en entendant la question de Na Yi. L’Œil du Dieu Sorcier dont elle parlait n’était nul autre que Yan Mo.
« Mon périple à travers le Royaume Divin a été assez chaotique. En revanche, j’y ai bien rencontré L’Œil du Dieu Sorcier dont tu parles. Retiens qu’une incroyable opportunité t’attends et que, si tu travailles suffisamment dur, tu auras une chance d’être sélectionnée. Le pouvoir qui t’y attend est considérable ! »
Lin Ming ne donna pas trop de détail au sujet de sa propre expérience. De toute manière, personne n’aurait pu croire qu’il avait franchi le septième étage.
« Je… je peux aussi y aller ? » Le cœur de Na Yi se mit à battre à tout rompre dans sa poitrine. Elle aspirait plus que tout à devenir plus forte. Non seulement elle voulait venger la mort de ses parents, mais aussi reconstruire la Tribu Na et, si elle en était capable un jour, tuer le Chaman Ver de Feu.
Cependant, ce dernier était tout de même un artiste martial au milieu du Houtian. L’écart qui les séparait était si vaste que sa vie toute entière ne lui suffirait pas nécessairement à le combler !
Mais qu’en serait-il si on lui donnait la chance d’atteindre le Royaume Divin ? Peut-être deviendrait elle tout aussi puissante que Na Yanda en son temps !
Elle pourrait même atteindre le légendaire palier Xiantian !
A ce moment-là, quels que soient ses objectifs, qu’il s’agisse de rebâtir la Tribu Na ou d’éliminer ses ennemis, tout deviendrait simple.
Cette perspective l’emplit d’ardeur et elle serra inconsciemment les poings. Elle voulait devenir plus forte, suffisamment pour contrôler son propre destin !
Elle regarda Lin Ming dans un torrent confus de sentiments. Il ne lui avait pas dit combien de niveaux il avait franchi, mais Na Yi était convaincue qu’il avait atteint le cinquième, voire même le sixième, surpassant ainsi sa Majesté le Fier Empereur !
Les habitants des Etendues Sauvages Australes vénéraient les héros, et il y en avait un en devenir juste devant elle ; garder son calme n’était pas aisé. Elle comprenait également l’étendue de la disparité qui les séparait. C’était un vœux pieu d’espérer qu’il reste à ses côtés pour l’aider.
Elle ne pouvait s’en remettre qu’à elle-même pour tracer son propre destin.
Le petit groupe finit par arriver à l’entrée de la Terre Sacrée du Sorcier. Na Yi actionna la matrice de téléportation et Lin Ming apparut en dehors. C’était exactement comme Na Yi l’avait décrit, quatre carcasses putréfiées de chevaux reposant non loin de l’entrée, dont deux à moitié dévorées. La chaleur humide de la région n’avait rien arrangé et une nuée de mouches s’agglutinaient autour des cadavres dans un balai macabre. C’était un spectacle répugnant.
Il y eut de l’agitation dans un buisson à proximité lorsque Lin Ming apparut et, l’instant d’après, un Loup Corrompu émergea en bondissant, ses yeux verts brillants d’une lueur sanguinaire en fixant Lin Ming avec appétit.
Son partenaire avait disparu et n’était pas réapparu malgré tous ses appels. L’animal était donc particulièrement furieux et comptait bien déchiqueter tout ce qui se présenterait à lui.
Na Shui pâlit de tout son être en le voyant et se cacha inconsciemment derrière Lin Ming. De son côté, Na Yi ne manifesta pas la moindre émotion. Elle savait pertinemment que ce Loup Corrompu n’était qu’un insecte dont il ne ferait qu’une seule bouchée.
« Aouuuh ! »
Le Loup Corrompu hurla furieusement en bondissant en avant, s’apprêtant à trancher la gorge de Lin Ming avec ses griffes acérées.
Ce dernier sourit du coin de la lèvre et, d’un geste de sa main, cent filaments de véritable énergie vibrante apparurent comme une volée de flèches et transpercèrent l’animal.
Une giclée de sang noirâtre jaillit de sa gueule. Tous ses organes avaient été pulvérisés par la déferlante d’énergie et il s’effondra pitoyablement sur le sol. Ses os furent broyés par la puissance du choc et il mourut immédiatement.
« Mort… il est mort ? » demanda Na Shui incrédule. Elle ne s’attendait pas à ce qu’il ait la moindre difficulté à s’en débarrasser, mais elle n’avait pas imaginé une seule seconde que cela pourrait être aussi simple. Le Loup Corrompu était mort au moment où son regard s’était posé sur lui !
Quel genre de force était-ce ?
Le souffle coupé, elle leva les yeux devant elle ; Lin Ming occupait tout son champ de vision. Un sentiment mêlé d’admiration et d’adoration naquit en elle. A ses yeux, c’était un héros !
« En avant, dit-il.
– Où allons-nous ? demanda Na Yi.
– Il faut que nous trouvions un endroit où vous puissiez vous établir. Après quoi je remplirai ma part du marché. Je me rendrai dans la Tribu du Ver de Feu, je tuerai Chi Guda et vengerai vos parents ! »
Lin Ming commencerait par éliminer Chi Guda avant de se rendre dans la Montagne Frappée par l’Orage pour voir l’Herbe de Tonnerre de ses propres yeux. Quant à la flamme éternelle de la Tribu du Ver de Feu, ce n’était pas sa priorité.
« Tu vas tuer Chi Guda maintenant ? »
Na Yi tressaillit. Chi Guda était à un demis-pas du Houtian. Non seulement cela, mais il serait très certainement entouré de nombreux maîtres. Lin Min en était seulement au sommet du Façonnage Osseux. Sa force avait beau être extraordinaire, le risque était trop grand !
Après tout, la différence entre les étapes de la Transformation Musculaire et du Façonnage Osseux était nettement moindre que celle entre l’étape du Façonnage Osseux et la Condensation de L’impulsion.
Elle ne put s’empêcher de dire : « Je sais que tu es particulièrement fort, mais Chi Guda est à un demis-pas du Houtian…
– Cela n’a aucune importance. Si quelque chose ne se passe pas comme prévu je pourrais toujours facilement m’échapper. En avant ! » coupa-t-il.
Na Yi n’eut pas le temps d’ajouter quoi que ce soit que Lin Ming s’était déjà retourné et commençait à s’éloigner. Elle ne pouvait rien faire d’autre que soupirer et garder ses préoccupations pour elle-même.
Elle sentait bien que Lin Ming était un jeune garçon particulièrement têtu. Il n’était pas du genre à changer facilement d’avis. De plus, il était destiné à devenir un demi-dieu. S’il était suffisamment confiant pour dire qu’il pouvait le faire, alors il y parviendrait.
Tandis qu’elle réfléchissait, le regard de Na Yi se posa sur sa petite sœur. Cette dernière regardait Lin Ming dans son dos, ses délicates petites pommettes toutes rougies et ses yeux regardant furtivement à droite à gauche comme si elle avait honte de ce qu’elle faisait.
Na Yi fut stupéfaite, puis elle réalisa soudainement, peut-être que Na Shui était tombée amoureuse de Lin Ming ?
Une fois la puberté venue, les adolescentes commençaient souvent à s’intéresser aux jeunes du sexe opposé. Evidemment, à cela s’ajoutait le fait que Lin Ming était particulièrement beau jeune homme, en plus d’être intelligent, puissant et mesuré. De plus, à chaque fois que Na Shui avait eu à affronter une crise et s’était trouvée dans une situation désespérée, Lin Ming était apparu devant elle et avait tout résolu comme si de rien était. Cela avait inévitablement fait naître un sentiment d’admiration de sa part envers Lin Ming, et elle était tombée profondément amoureuse de lui sans s’en rendre compte. Peut-être même qu’elle n’avait pas du tout conscience de ses propres sentiments…
Na Yi soupira. Il y avait un gouffre bien trop important entre Lin Ming et sa petite sœur, et ce à tous les niveaux. Elle ne souhaitait cependant pas interférer avec les sentiments de sa petite sœur et, quoiqu’elle ait bien conscience de ce gouffre, elle ne pouvait pas non plus considérer leur différence de statut au risque de se désavouer elle-même. Elle n’avait pas d’autre choix que de laisser la nature suivre son cours…
…
La Tribu de la Vallée Brumeuse était une tribu sans grand intérêt parmi les innombrables petites et grandes tribus des Etendues Sauvages Australes. Elle comptait seulement quatre à cinq mille âmes et se trouvait dans une vallée montagneuse qui, au petit matin, s’emplissait d’un épais brouillard ; ce qui lui avait donné son nom.
La Tribu de la Vallée Brumeuse se trouvait à seulement neuf cents kilomètres de la Tribu du Ver de Feu, dont elle était vassale depuis maintenant une dizaine d’années. Leur chef avait été tué et, désormais, ils étaient dirigés par un homme du Ver de Feu qui veillait à ce qu’ils versent chaque année un tribut en cochons, bovins, moutons, soie, vins et minéraux.
Il arrivait même parfois qu’ils doivent offrir leurs plus belles femmes en cadeaux. La plupart des tribus des Etendues Sauvages Australes étaient des sociétés matriarcales au sein desquelles les harems étaient proscrits. Cependant, il existait également des clans patriarcaux comme la Tribu du Ver de Feu qui ne se gênait pas.
Leur chef, leurs généraux et leurs chamans étaient tous des hommes, et ils possédaient tous des harems aux femmes toutes plus magnifiques les unes que les autres.
La Tribu de la Vallée Brumeuse n’était pas très grande. Cependant, de par sa localisation à un carrefour de routes importantes, elle voyait transiter un grand nombre de visiteurs. Il y avait de nombreux hôtels, restaurants et autres établissements visant à les accueillir.
L’Auberge du Manoir Brumeux était l’une des plus importantes. Aujourd’hui, parmi la clientèle, se trouvait un jeune homme et deux jeunes filles d’une quinzaine d’années. Le jeune homme portait un sabre sur son dos et un chapeau de bambou. C’était probablement un artiste martial. Quant aux deux jeunes filles à ses côtés, elles portaient des voiles qui cachaient leur visage. Cependant, leurs silhouettes minces et élancées laissaient présumer une beauté évidente.
Un serveur s’approcha d’eux avec un sourire accueillant en les voyant. Ils avaient beau être jeunes, d’après son expérience au sein de l’établissement, le serveur se dit qu’il s’agissait probablement d’individus exceptionnels aux origines fort distinguées. D’où son attitude particulièrement attentive à leur égard.
Il existait une multitude de tribus et d’ethnies à travers les Etendues Sauvages Australes, qui possédaient toutes leurs propres coutumes. Par conséquent, le serveur ne fit pas plus attention que cela à leur accoutrement.
Il soupira intérieurement en arrivant à leur hauteur. « Ce jeune garçon a bien de la chance avec les femmes pour être accompagné par deux filles aussi jolies », se dit-il.
« Soyez les bienvenus voyageurs, prévoyez-vous de résider dans notre établissement ?
– Mm », acquiesça le jeune avec un chapeau en bambou. Il s’agissait de Lin Ming.
Il lança une pièce d’or au serveur et lui dit : « Donnez-nous deux chambres voisines et occupez-vous de nourrir nos chevaux. » Ils avaient acheté trois bons chevaux en arrivant. Une fois les préparatifs pour éliminer Chi Guda terminés, ils quitteraient immédiatement la Vallée Brumeuse.
Lin Ming ne craignait pas d’attirer l’attention. La Tribu de la Vallée Brumeuse, de par sa position géographique, constituait un carrefour incontournable par lequel transitait des foules de voyageurs. Leur petit groupe n’avait donc rien d’extraordinaire et ne risquait pas d’éveiller le moindre soupçon.
Un individu ordinaire ne pouvait tout simplement pas percer à jour la cultivation de Lin Ming. Quant à Na Yi et Na Shui, elles n’en étaient qu’à l’Entraînement des Entrailles, soit rien de si étrange pour des filles douées à leur âge. De plus, elles avaient pris soin de dissimuler leurs apparences pour éviter tout problème.
« Vous arrivez à point nommé voyageur, c’est vraiment une coïncidence divine. Il se trouve qu’il nous reste justement deux de nos plus belles chambres voisines l’une de l’autre. Je vais vous les préparer de ce pas. »
Le serveur acheva sa phrase et emmena le petit groupe jusqu’aux chambres en question. Lin Ming jeta un coup d’œil à l’intérieur, tout y était propre et bien ordonné. Satisfait, il fit un signe de tête approbatif ; cela ferait bien l’affaire.
« Préparez-nous de quoi manger et du thé.
– Vous désirez du thé ? hésita le serveur avant de sourire et de reprendre, vous l’ignorez sans doute voyageurs, mais le Vin de Fleur de la Brume est réputé à travers l’ensemble des Etendues Sauvages Australes. Nous en offrons tous les ans en tribut à la Tribu du Ver de Feu. Ils en utilisent à chacun de leurs plus grands banquets !
– Eh bien ! dans ce cas apportez m’en donc un pichet. » Même s’il ne buvait pas plus que cela, Lin Ming avait grandi dans un restaurant et savait apprécier un bon vin de temps en temps.
« Avec grand plaisir. Si vous me le permettez, laissez-moi aussi vous recommander nos Grenouilles de la Vallée Boueuse. Elles sont également très appréciées par nos clients. Vous n’oublierez jamais leur gout unique une fois que vous en aurez mangé.
– Mm. Très bien, nous en prendrons un plat. »
Le serveur hocha la tête et parti en direction de la cuisine. Lin Ming n’attachait pas une grande importance à ce qu’il mangeait. Il posa son sabre contre une table et s’assit avec les deux sœurs Na.
Cependant, dès que les Grenouilles de la Vallée Boueuse et le Vin de Fleur de la Brume leur furent servis, ils s’en délectèrent avec une satisfaction non dissimulée. Ces mets étaient des délices rares.
Na Shui mangeait avec un appétit certain, mais le voile qui lui recouvrait le visage la gênait et elle était obligée d’avaler petits morceaux par petits morceaux.
Le son du piétinement effréné de sabots retentit tout à coup à l’extérieur de l’auberge. Lin Ming jeta un coup d’œil en direction de l’entrée et aperçut cinq cavaliers trônant dignement sur d’immenses chevaux rouges s’arrêter devant l’établissement. Leurs montures avaient fière allure avec leurs crinières taillées court, leurs trois mètres de haut et leurs corps massifs. Leurs renâclements retentissaient comme le tonnerre. Ils pesaient probablement plus de deux mille jins.
« Des Chevaux de Sang Cramoisis ? » Lin Ming connaissait cette espèce. Dans le Royaume du Grand Avenir, un tel destrier coûtait quatre à cinq mille taels d’or !
Peut-être étaient-ils plus répandus à travers les Etendues Sauvages Australes ?
L’un des cinq cavaliers en armure de cuir mit le pied à terre. Il était particulièrement grand lui aussi et portait une lance sur son dos. De forte carrure, il marchait d’un pas tranquille et assuré. Son souffle était long et n’importe qui pouvait facilement voir qu’il s’agissait d’un maître ayant parfait les techniques fondamentales.
Les quatre autres cavaliers étaient nettement plus ordinaires. Toutefois, en marchant, ils laissaient tous échapper inconsciemment une menaçante aura meurtrière, fruit évident de leur expérience de guerriers endurcis par les innombrables batailles auxquelles ils avaient pris part et meurtres qu’ils avaient probablement commis.
